William Gourdin | Insect-Like / Like-Insects

AFIAC-ement Vôtre

Dans la diversité des lieux dédiés à l’art contemporain en Midi-Pyrénées, il en est un – AFIAC – dont il est difficile d’appréhender s’il est un lieu de résidence, un centre d’art, un Artist Run Space, un show room à ciel ouvert ou une scène performative. Peut-être tout cela à la fois, me direz-vous, tant sa diversité programmatique en fait un lieu unique. Cette spécificité fiacoise – liée à une personne, Patrick Tarres, que je tiens à saluer et remercier profondément ici, et à un territoire, le Pays d’Agout, qui souvent me fait penser à cette Toscane vallonnée soufflée par le libeccio – a été délocalisée en cette fin juin 2014 sur la commune de Lautrec. Cette nouvelle édition intitulée Insect-like / Like Insects nous prouve une nouvelle fois l’utilité de ces rencontres.

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Ainsi Patrick décida de m’inviter pour cette nouvelle édition et me détailla de prime abord le thème sur lequel il s’était arrêté : les insectes. Avec cet axiome Insect-like / Like Insects comme titre générique. Un titre dont la dualité ne me permit dans un premier réflexe que de lui répondre :
« Tu sais Patrick, moi les insectes,
ils ne sont pas trop mes amis.
Je les fuis plus que je ne les mange… »
Mon milieu professionnel ne me permettait point en effet de les apprécier outre mesure. Mon quotidien au teint nordique – tirant plutôt vers le rouge flamboyant dès les premières chaleurs – en rajoutait beaucoup dans ce Midi aux étés chaleureux si hospitaliers pour les hexapodes. Le sujet ne m’exaltait donc guère, je le confesse, mais je le resituai immédiatement dans ce contexte d’AFIAC ; c’est-à-dire dans ce projet un peu fou où se rencontrent artistes et habitants dits ruraux au coeur du pays de Cocagne.
Je resongeai également aux travaux d’Hubert Duprat, de Jan Fabre et de Peter Koogler, présents dans la collection des Abattoirs et dont j’avais pu admirer à plusieurs reprises le travail lors d’expositions et dans nombre d’ouvrages. De l’un, je gardais en mémoire ses formidables larves de phryganes, du second la symbolique à laquelle il rattachait les scarabées sacrés d’Égypte, du dernier je me rappelais ses incursions digitales de formicidae. Je me laissai donc tenter par l’aventure. Patrick me donna rendez-vous à Lautrec et me fit visiter cette formidable cité qui était prête à accueillir cette nouvelle édition. Une visite studieuse où patrimoine et vie associative se mêlaient d’une façon vivifiante et qui finissait de me décider à embarquer dans l’aventure.
Se profila alors le moment du choix. Ce choix curatorial des artistes devant participer à cette péripétie si particulière qui propose de se confronter directement à la vie quotidienne et intime d’une famille pour y construire un projet in situ. Une double invitation vers l’inconnu, résultat d’une rencontre fortuite en quelque sorte, qui d’un mariage forcé accouche d’un monstre à la maison. Un art social qui tend à reprendre l’idée que l’art peut et doit être partout et pour tous. Un défi fou qui à l’aune du troisième millénaire caractérisé par un individualisme génétiquement modifié résonne comme une profonde et sincère utopie : faire se rencontrer le monde de l’imaginaire avec celui du quotidien. Le choix devait être subtil et je me décidai alors à inviter Suzy Lelièvre, Agnès Rosse et le collectif IPN.
L’insecte, ce dinosaure qui résista à 25 millions d’années d’évolution, que nous craignons et dont nous saisissons encore avec difficultés l’utilité environnementale, devenait le centre d’un intérêt impromptu. Cet être aux pouvoirs cachés et aux symboliques perdues serait – j’en étais persuadé – appréhendé par ce trio d’une manière ou d’une autre avec intelligence, patience, surprise, jeu, sincérité, que sais-je encore. Ce prétexte iconographique et sémiologique ne restait plus qu’à être exploré et sublimé. Les rencontres se firent – en voici la restitution en images.
Ainsi, dans la lignée de la sculpture sociale décrite par Beuys, cette édition de l’AFIAC réussit une nouvelle fois à tisser des liens entre la réalité du quotidien de familles lautrécoises et celle toute créative des artistes invités.
À mon plus grand plaisir et au vôtre, bien sûr.
Qu’ils en soient tous ici remerciés du fond du coeur.

William Gourdin


Commissariat

Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : William Gourdin assistant de direction Frac Midi-Pyrénées, chef de projet d’exposition et de diffusion en Région, et Paul de Sorbier directeur de la Maison Salvan à Labège.

Les artistes à Lautrec

insect-like-content002Julien Salaud, Pierre-Laurent Cassière, Nicolas Fenouillat, Denise Bresciani, Agnès Rosse, Suzy Lelièvre, Le collectif IPN, Collectif Ding, Benedetto Bufalino, Linda Sanchez.