Skall cultive un jardin secret, c’est le souvenir d’un Orient lointain où il passa une partie de sa jeunesse. Des images de « pudja » avec des offrandes de fruits et de fleurs restent gravées dans son regard. Désormais, il vit comme un sâdhu dans la jungle des villes, un moine du XIIIe arrondissement, un paysan de Paris aux rayons de supermarché des frères Tang.
Mais Skall n’a rien de dogmatique. L’archaïsme et l’exotisme de sa production sont vite rejoints pas une extrême modernité. C’est une expérience corporelle, la somme des perceptions et des affects d’un homme qui ouvre les yeux sur le monde et qui est capable, de révéler un paradis dans l’enfer de la banalité.
Skall est lui-même la plus convaincante de ses créations. Il faut avoir vu ses performances, parfois splendidement photographiées, où il apparaît quasi-nu, chaussé de cothurnes en boîtes de conserves ou en pantoufles de poulets crus, le corps enrubanné, la tête coiffée de branches ou de plumes. Il se métamorphose alors en nuage, en oiseau de paradis, en cerf en rut… On comprend alors qu’il se trouve à la tête d’un univers dont il ne livre, à chaque apparition publique, que quelques aperçus rapides, mais dont il contrôle la cohérence et l’unité.
Il ne s’agit, en aucun cas, d’un programme intellectuel. Plutôt de l’incarnation d’une certaine sagesse, d’une certaine étrangeté, aussi, car, s’il se sent bien partout, Skall n’est chez lui nulle part.
Olivier Goetz
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