Elle est où la baballe ?
En 2014, les Abattoirs Frac-Midi-Pyrénées se sont portés acquéreurs d’un ensemble de photographies de Gaël Bonnefon, privilégiant dans le corpus développé par ce dernier l’idée d’un certain « éclatement » paysager, un choix qui est une suite directe à l’intervention de l’artiste lors de l’édition 2013 de Afiac. C’est au golf des étangs que Gaël Bonnefon a travaillé. Au restaurant du golf, il a posé ses images sur des sets de table. Mais il les a aussi lancées dans le parcours. Sur le mur du practice – un étrange stand de tir face à un étang – Bonnefon a placardé l’image d’un chien couché sur le flanc, allongé sur un sol marbré. La bête y est rincée. Elle est comme brisée d’avoir couru après le leurre d’une balle qui ne lui était pas destinée. Elle est sèche et son humidité est ailleurs. Sa sueur pourrait être celle qui suinte, animale, dans chacune des vues lacustres produites par le photographe à cette occasion.
Le gris bleu du ciel et le vert des mares posés dans ces clichés le sont derrière le fard d’une bruine qui s’assimile à une transpiration. Subjective, prise à la volée, la photographie de Gaël Bonnefon n’est pas pour autant le rendu d’une vision épileptique ou la traque d’un acmé destiné à être figé dans un instant éternel. Son intensité se développe dans un état physique lent, de l’ordre de l’épuisement ou de la récupération. Ses instants et ses vertiges, fixés dans des décadrages et des virages chromatiques métalliques, rappellent – même dans des clichés exempts de toutes traces humaines ou animales –
le début et la fin d’une course. « Elle est où la baballe » était le titre donné par l’artiste à son exposition. L’on en retient le claquement à vide qui saisit un chien lorsque l’on garde le projectile dans la main.
Olivier Michelon