Joachim Montessuis
Fiac 2007 – + si affinité Trans-Rituel 1
Un événement de l’AFIAC
Commissaire d’exposition : Pascal Pique
Directeur artistique : Patrick Tarres
L’artiste était reçu chez Yves FARCY et Amaed SIDOUM.
J’ai toujours été attiré par l’idée qu’inventer son propre rituel était un moyen d’appréhender l’expérience de la réalité sous un angle ouvert et exponentiel. J’ai découvert la transe dans mon enfance, au Maroc avec les Gnawas ; j’avais dix ans.
Puis ensuite ce fut ma rencontre avec Serge Pey à Sauve en 1994, dans le cadre de l’anniversaire de l’Art (Robert Filliou), et plus tard ma rencontre avec les Baloutches et Jean During à Strasbourg.
Enfin, en 2004, toujours à Strasbourg, j’ai été invité à faire une expérience avec des moines tibétains dont le grand maître de chant du Monastère de Gomang (Inde) : j’ai enregistré puis accumulé leurs voix en temps réel jusqu’à saturation. A Fiac, il s’agissait d’accompagner un coq dans le « Bardo » pendant trois jours.
J’ai construit un environnement et une ambiance d’où tout contrôle était évacué par la perte des repères visuels et par une saturation sonore extrême avec le cri du coq très amplifié et ralenti en synthèse granulaire. Le son s’entendait à un kilomètre à la ronde. On entrait alors dans un temps dilaté ou hors temps (Bardo tibétain), dans une ambiance lumineuse de fumée sur un sol de sel (750 kg).
Ma famille (Yves Farcy et Amaed Sidoum) me réserva un accueil remarquable et un dévouement complet pour réaliser ce projet qui a été une expérience intense pour les habitants de cette maison et parfois aussi pour les visiteurs dont les réactions ont été très variées. Le rituel a pris fin quelques semaines après lorsque mes hôtes et leurs amis sont allés jeter le sel dans la mer.
J.M.
« Dans le Bardo, chaque fois qu’un animal est sacrifié – en général pour servir à la nourriture – le défunt est dit être incapable d’échapper au résultat Karmique du sacrifice fait en son nom, de telle sorte que l’horreur lui en revient directement. Il crie aux vivants de cesser, mais, comme ils ne l’entendent pas, il est enclin à se mettre en colère et la colère doit être évitée à tout prix, car si elle s’élève sur le plan du Bardo, telle une lourde charge, elle force le mort à s’enfoncer dans les états d’esprits inférieurs appelés Enfers. »
« Alors, un des bourreaux furies du seigneur de la Mort enroulera une corde autour de ton cou et te traînera ainsi. Il coupera ta tête, arrachera ton coeur, sortira tes intestins, lèchera ton cerveau, boira ton sang, mangera ta chair, rongera tes os, mais tu seras incapable de mourir. Bien que ton corps soit haché en morceaux, il revivra encore. Ces supplices répétés te causeront douleurs et tortures intenses. Même au moment où les cailloux seront comptés ne sois pas effrayé ni terrifié ; ne mens pas et ne crains pas le seigneur de la Mort. Ton corps étant un corpsmental est incapable de mourir, même décapité ou dépecé. En réalité, ton corps est de la nature du Vide. Tu n’as pas besoin de craindre. Les Seigneurs de la Mort sont tes propres hallucinations.
Certains êtres animés par une trop longue association avec leurs tendances, rendus incapables d’abandonner leurs habitudes et chargés du mauvais Karma de la jalousie, sont terrifiés par les sons et les rayons. « le crochet des rayons de la grâce » n’ayant pu les saisir, ils rôdent jusqu’au cinquième jour. Si l’on fait partie de ces êtres animés, ce jour, le Bhagavân Amogha-Siddhi entouré de ses divinités et rayons lumineux de sa grâce, viendra vous recevoir. La confrontation consiste à appeler le Mort par son nom et à dire « Ô fils noble, écoute sans distractions.
Le cinquième jour, la lumière verte de la forme primitive de l’élément «air» brillera sur toi » …
… L’agrégat de la volonté, en sa forme primitive de la lumière de la Sagesse qui peut tout accomplir, d’un vert surprenant, transparent, radieux, magnifique et terrifiant entouré d’orbes de radiations, sortant du coeur du Divin Père-Mère Amogha Siddhi comme un rayon vert éclatant, te frappera au coeur et tu seras à peine capable de le regarder. Ne le crains pas, c’est le pouvoir matériel de ta sagesse personnelle que tu vois. Demeure en grande résignation et en toute impartialité. »
Extraits du Bardo Thödol, le livre des morts tibétain, ou les expériences de la mort dans le plan du Bardo
(traduction Française de Marguerite La Fuente).