Michel Giroud- Trans-Rituel 1 – + si affinité 2007

Michel Giroud

Fiac  2007  –  + si affinité  Trans-Rituel 1

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez des gens du village et d’ailleurs, l’école de FIAC et ACEE.

« L’Aventure du Musée des Muses Amusées »

michel-giroux-1

L’ouverture de la première ANNEXE du Musée des Muses AMusées (MMAM)(1) ou Musée Totalement Potentiel (MTP), fondé en 1999 (in Alpina) et de sa RESERVE (dans l’entrepôt d’un artisan ébéniste de la commune) constitua une expérience vraiment Transversale, avec la participation de l’école primaire (à chacun son drapeau d’images et de couleurs, donnés au Musée), du café-restaurant-épicerie, de l’inventeur du trône de Caramba El Coyote, du musicien free Méphistofeles, du guide bienveillant Patrick, des donateurs (comme l’institut des Marianistes) et des prêteurs. Il y eut les oeuvres « diverses » (Théâtre de Variétés) montrées dans la galerie-garage et les oeuvres « trouvées » sur le territoire de la commune (la Cathédrale à blé, le château d’eau du village, le billard et quelques tableaux-réclames du bistrot des rencontres et le Tarn tout entier, avec sa carte du Pays de Cocagne : une carte future des découvertes signalera les pigeonniers, le grand Menhir, le Monastère tibétain, la congrégation des Béatitudes, le golf et sa réserve polyphonique de grenouilles…).

Car il y eut non seulement intronisation hilare (vive Saint Hilarius) du Coyote, en tant que (Re)fondateur de l’IMPERIUM ASINUM MAGNIFICUM (avec son académie des Anes), sur la place du village mais aussi un concert duo pour trompette de cavalier,saxophone et bidon-tambour (Total) et une première catéchèse assez excentrique mais sérieusement (avec ou sans allusion à la sérieuse, une bière Formidable, flamande ou Chti) dans le presbytère.
Que tout soit (Fiac Lux) enfin, à nouveau relié, quoi de plus nécessaire (voir Brisset le théologien du calembour), au-delà des vains combats sectaires des diverses églises temporelles et spirituelles !
Le Musée des Muses AMusées (clin d’oeil à Saint FOURIER, Prince du Fou Rire) a commencé sa longue (déjà) carrière (dans les années 80), à FIAC (grâce au jeu des rencontres imprévues : Joël Hubaut, Pascal Pique, Patrick Tarres), d’entrecroisements inévitables (avec l’école primaire Républicaine, l’institut de la Vierge Marie, l’Eglise, l’hôpital psychiatrique de Lavaur (2), le Monastère tibétain et le flamenco, la congrégation des Béatitudes, les bouquinistes et disquaires ainsi que la boutique MOTUL (la casquette célèbre de Rossi, pas Tino !) de Lavaur.
Le projet fondamental du Musée Totalement Potentiel (MPT) est d’ouvrir des voies spirituelles (spirit) dans toutes les directions, hors des limites (casquettes idéologiques) pour une émancipation (urgence) des imaginations en résonances (vers la raison déployée en réseau d’échos), sur la Terre, avec les Amis de la Terre, pour en finir avec les jugements et les cloisonnements mortifères (3).
Que le TARN TOUT ENTIER devienne un PAYS DE COCAGNE, en transe (TARN’S TRANS).
Michel Giroud, fondateur et gardien de l’Empire du Musée Potentiel, In Alpina, avril 2008.

(1) Le Musée s’inscrit au coeur du domaine Mille voix/1000 voies, où 9 types d’activités (ou d’entreprises) s’imbriquent : le service secret (SAS), le parti (PAC), la secte (SDF), l’université (Nomadique université), l’institut de Patatalogie (PTT, Poésie Totalement Totale), le Musée (MMAM), le bureau de tourisme (TTT), l’école des gestes (Taî-Coyote-Tchi ou TCT), l’empire (IAM).

(2) Au centre psychiatrique de Lavaur, rencontre avec Francesco Finizio, son exposition-action. Bonjour aux cathares (et leurs amis) assassinés (brûlés vifs) par la Sainte Eglise Inquisitoriale et (Re)bonjour au Momo, enfermé à Rodez, auteur audacieux du « Pour en finir avec le Jugement de Dieu », sans oublier nos cousins vaudois de Lyon (Pierre Valdo) et tous les insoumis.

(3) Un projet commun (vers un trans-festival Bauls Inde-France) est en cours avec Ardèche Sud (festival de Lagorce « l’art des corps » vers 2009/2010).

Renseignement ou courrier au bureau tarnais du MMAM
c/o Patrick Tarres ou Gerwulf/Coyote
Rue du Colombier, Fiac 81500

michel-giroux-3

Michel Giroud en transe sur le trône érigé par Pan sur la place du Four à Fiac rebaptisée « place du Fou » par El Coyote.

michel-giroux-4

Le Musée des Muses Amusées ou Musée International du Don avec près de deux cents dépôts en trois jours.

michel-giroux-5

michel-giroux-2

 

Traces | Vidéos

Trans – Rituel 1 – + si affinité 2007 – Fiac

+ si affinité 2007  – Fiac

10 artistes        10 familles

Trans-Rituel  1 

 

Pour de Nouvelles Cosmogonies
par Pascal PIQUE

Quel est donc cet étrange rituel auquel se livrent les habitants de la commune de Fiac au beau milieu du Tarn depuis huit années maintenant ? Un rituel qu’ils ont eux-mêmes inventé et qui consiste, tous les ans à la même période, comme par hasard juste après le solstice d’été, à ouvrir pendant trois jours leur village et leurs demeures à des milliers d’étrangers. Dix familles de la tribu fiacoise convient donc dix artistes contemporains à investir leur territoire pour créer une oeuvre spécifique qui est donnée à voir à des hordes de visiteurs qui feront le lien entre espaces privés et espaces publics. Mais comment interpréter ce phénomène sporadique et tout à fait endémique ? S’agirait-il de l’un de ces nouveaux rituels « païens » remarqués et étudiés de près par nombre de sociologues, anthropologues, éthologues, psychologues sociaux ou psychanalystes. Il se dit en effet que depuis trente ou quarante ans, les peuplades d’Occident renouvelleraient leurs rituels tout en entretenant avec eux un rapport assez paradoxal.
Pourtant, certains observateurs parlent d’un mouvement général de « déritualisation » qui correspondrait à la disparition définitive dans notre civilisation des formes de pensées « mythiques » et « sauvages ». Il est vrai que ces formes ont été éradiquées au fil des siècles sous le double effet d’une diabolisation orchestrée par la religion dominante d’une part et d’autre part, du fait d’une sacralisation croissante de la pensée rationnelle, objective et productive. Il est vrai aussi que les mécanismes du rite, même si ils restent partout présents, sont souvent considérés comme issus de pratiques désuètes. Jusqu’à par exemple associer le terme de rituel à des manies obsessionnelles ou à des troubles compulsifs du comportement. D’autres observateurs attestent a contrario d’une « re-ritualisation » progressive en s’appuyant, au-delà des rites familiaux, sur l’audience croissante des grandes messes médiatiques, politiques ou sportives (festival de Cannes, fête de la musique, coupes du monde et tournois divers). Sans parler des nouveaux phénomènes de cultures urbaines comme le hip-hop, le graf, le rap ou le slam.

Fiac et l’art contemporain dans tout ça ?

Quid de l’aventure fiacoise et de l’art contemporain dans ce panorama même si ces derniers ne bénéficient pas encore de la même couverture médiatique ni d’une curiosité critique et scientifique avérée (encore que) ?
Pourtant, selon les grilles de lecture en cours, le projet générique de Fiac baptisé + si affinité participe bien de la définition du rituel. Il se caractérise par un cadre formel et temporel établi, de même que par une dimension spectaculaire et performative. Par ailleurs, Fiac produit à ce moment précis un espace-temps singulier. Le rituel général et les rituels particuliers inventés par les habitants et les artistes atteignent souvent une dimension « magique » en transformant les rythmes, les gestes et les imaginaires du quotidien.
Et puis surtout, ils reposent sur une structure du don et du contre-don à tous les niveaux de la triangulation familleartiste- visiteur. En particulier dans la dimension initiatique du projet à travers une sensibilisation à l’art contemporain tout à fait inédite que les protagonistes prodiguent personnellement et directement à l’égard du public. Si bien que la question de l’architecture et du lien social qui est au centre des considérations sur les nouveaux rituels, trouve à Fiac des réponses à la fois originales et prometteuses qui pourraient bien faire office de modèle. Et sans manquer au passage de faire la démonstration que l’art contemporain a son mot à dire et son rôle à jouer, c’est-à-dire toute sa place, dans les signes de bonne santé sociale et mentale de notre civilisation occidentale. Mais de ceci on n’entend encore trop peu parler chez nos amis sociologues, anthropologues, éthologues, psychologues sociaux ou psychanalystes.
En France du moins. Or, c’est justement cette double habilitation de la création contemporaine et de la matrice rituelle dynamisée et renouvelée par les artistes, que vise le projet Trans-Rituels.

Un programme expéri-mental

Après avoir exploré les domaines de la fantasmagorie, du rêve et de l’imaginaire lors des années précédentes, c’est donc à partir de la mise en équation des notions de transe et de rituel, que les éditions 2007 et 2008 de + si affinité poursuivent une approche expérimentale de l’art, du réel et du mental.
Le phénomène de la transe fait référence à un état de conscience intermédiaire, distinct de la veille, du sommeil et du rêve. Cet état mystérieux déborde la raison ordinaire pour opérer une jonction, une articulation entre l’humain et son environnement. Ce phénomène a été identifié comme étant et demeurant peut-être (cela reste une hypothèse), à l’origine des premières formes comme de la fonction vitale de l’art et de la culture dans toute l’histoire de l’humanité.
Les rituels peuvent aussi intervenir pour marquer des transformations, surmonter des ruptures et des discontinuités à des moments critiques dans le temps des individus et des groupes sociaux. Ils s’inscrivent dans le quotidien ou se réfèrent à des calendriers et à des temporalités spécifiques.
Ils sont chargés d’une efficacité et d’une expressivité qui leur est propre : comme donner sens au désordre, à l’accidentel, à l’incompréhensible, à l’immaîtrisable. Ils peuvent ainsi offrir à leurs acteurs et à leurs spectateurs, les moyens symboliques psychologiques de maîtriser le temps ou la violence des rapports sociaux.
En ethnologie, la transe et le rituel sont enfin associés, que ce soit dans l’étude des civilisations dites « primitives » et la persistance de certaines pratiques (chamanisme), ou dans l’observation de comportements contemporains individuels ou collectifs (religions, musiques rock ou techno, grandes messes sportives culturelles et politiques).
Aujourd’hui, la question de la transe et du rituel semble des plus sensibles : qu’est-ce qui se transforme, se perd ou se retrouve, dans leur permanence et leur renouvellement ?
Car ils ne sont jamais ni anciens ni nouveaux mais sans cesse à réinventer et reconsidérer. En fait, ces marqueurs de fictionnalité, c’est-à-dire de non-sens apparent, ne sont-ils pas à voir comme des facultés propres à réactiver la position de l’individu dans la culture, la nature et le cosmos ?
Encore faut-il déjouer la distance vertigineuse que les dogmatismes, occidentaux ou non, ont érigé en carcans de l’âme et du corps, de l’esprit et de la matière, condamnés à être séparés du monde.
C’est bien l’enjeu de ce projet intitulé Trans-Rituels. Ici, le préfixe « Trans » accolé au vocable « Rituels », invoque la nécessité du changement, celle du passage à travers, au-dessus, au-delà, des frontières admises, celle de la transversalité et de la sortie de l’univocité et de l’impasse.
Comme pour toujours réinventer une poétique de notre liaison à l’univers. Peut-être avec de nouveaux rituels « traversants » à même de provoquer d’autres jonctions oud’autres pratiques. + si affinité, qui est devenu un véritable rituel, pourrait en être le théâtre et le vecteur.
C’est pourquoi les artistes conviés à cette aventure sont issus aussi bien des arts plastiques que de la performance, de l’image, du son et de la danse que de l’écrit et du verbe, c’est-à-dire de l’art pris au sens large du terme. Venant ou faisant référence à des horizons culturels et/ou géographiques les plus divers, ils sont invités, avec les habitants et les visiteurs de Fiac, à donner forme, corps et sens à cette tentative d’une autre approche transartistique, transculturelle et transcivilisationnelle. Une aventure transformationnelle que la création contemporaine, disons-le clairement, est l’une des rares à pouvoir instruire.

Les transversales du Coyote

À cet égard, l’énergie déployée par Michel Giroud pour Trans-Rituel a été déterminante. Tant au niveau de la programmation à laquelle il a activement participé, qu’en termes de propositions transversales développées sur tout le village.
Historien et critique d’art hors pair, Michel Giroud est aussi éditeur (collection L’Ecart Absolu), performer, écrivain, poète et désormais artiste. Car l’artiste est le seul à pouvoir légitimer ce qu’il fait. Son totem, le coyote, a dû lui enseigner comment le bon sens et la folie allaient de pair. Tout comme lui, il dit « obéir aux vents cosmiques ». Ces préceptes sont au coeur de la pensée de l’interface, de la réversibilité et du renversement perpétuel des codes figés de la culture et de l’art, qu’il taille à coup de verbe, de marteau, de faux ou de clairon. Non pas dans une perspective de clôture ou de cloisonnement mais au contraire pour une émancipation mentale, physique et spirituelle en vue d’une « réanimation des âmes et des corps ». C’est à cet effet qu’il propose l’ouverture d’un « Centre de Reconversion Transformationnelle » dans l’ancienne maison de retraite des frères marianistes de Fiac. Non loin de là et en guise de prolégomènes, il a inauguré un nouveau catéchisme avec une séance de « Poésie Totalement Totale » transdisciplinaire qui mêle philosophie métaphysique, théologie spirituelle et théorie scientifique.
C’est ainsi qu’ont été invoqués quelques apôtres de l’émancipation de la pensée, depuis Diogène de Sinope à Proudhon en passant par Fourier, ou de Riemann à René Thom en passant par Beuys, Broodthaers et bien sûr Filliou. Avec à la clef un message qui n’est pas sans rappeler l’anthropologue Marcel Mauss et sa théorie du don comme rite et Fait Social Total : le progrès de toute société humaine étant basée sur la complémentarité dynamique et symbiotique du psychique et du social, la stabilisation du rapport entre les individus passe nécessairement par le savoir donner, recevoir et enfin rendre. Ce serait la condition première à la réinvention permanente et totale de soi, de l’autre, et du monde pour laquelle Michel Giroud n’a pas fini de militer.

Poésie et Translangage

Mais la dynamique de l’échange ne concerne pas seulement les biens matériels ou symboliques, qu’ils soient régis ou non par des systèmes économiques, agnostiques ou divins. Elle relève d’une nécessité première et inconsciente « supérieure ».
D’où l’invention par Mauss du concept de « hau » qui évoque sans vraiment le déterminer ce processus qui serait de l’ordre de la pensée et du langage. Pour ne pas dire la pensée poétique. Celle de Charles Dreyfus incarne cette méta-connaissance . C’est pourquoi elle est nécessairement transgressive, dans ses prises de parole comme dans ses silences. L’environnement et le rituel qu’il a conçus à Fiac accueillaient le visiteur par un double avertissement : « Le langage m’habite sans gage » et « Ici déicide ». Histoire de préciser que la pensée poétique et la vie de l’esprit ne sauraient se satisfaire de petits arrangements mercantiles avec le Divin sous formes de gages, d’offrandes ou d’aumônes. Mais l’attaque du divin est ici plus fondamentale.
Elle consiste à libérer la pensée de la vérité unique implacable et de l’univocité du sens, installés entre autres par l’idée de Dieu. A l’opposé, la pensée poétique institue la dualité ou l’ambiguïté du sens au profit d’une exploration de l’indicible.
Ce à quoi faisait écho la litanie égrainée à l’infini pendant trois jours par l’artiste revêtu d’une toge blanche et d’une sorte de moulin à prière : « Taire cet élément, c’est élémentaire ». Mais le taire ainsi (sous la forme d’une sorte de transe verbale), c’est aussi dire haut et fort la nécessité de plonger la langue dans la polysémie et l’invisible pour toujours et sans cesse ouvrir d’autres espaces d’interprétation.
À l’inverse du rétensif et mortifère « Ce dont on ne peut parler il faut le taire », le célèbre aphorisme du philosophe Wittgenstein, le rituel et la zone d’échange proposés par Charles Dreyfus nous permettent d’envisager la pensée poétique comme un « translangage » à fonction cognitive ré ouvrant en permanence la connaissance sur les mystères du vivant, de la mort et de l’infinitude.

Transgresser la mort

À travers sa mise en scène de la mort sur le parcours du golf de Fiac, Eric Madeleine a joué avec l’un des mécanismes les plus profonds et les plus sensible de la conscience humaine : déjouer le trauma occasionné par l’angoisse devant l’issue fatale que nous devons tous partager un jour ou l’autre.
Cette nécessité ontologique, commune à toutes les civilisations et à toutes les périodes de l’histoire, serait même selon certains chercheurs, à l’origine comme à l’articulation des pratiques du rite et de la transe. Préférant toutefois le terme plus moderne de protocole à celui de rituel, l’artiste n’en a pas moins livré une réinterprétation à double caractère anthropologique et poétique en donnant à la pratique du golf une portée inédite. Il est vrai qu’il se définit lui-même comme « producteur de geste, sculpteur de compétences et tailleur de coutumes ». N’oublions pas qu’il a inauguré ce programme précurseur et visionnaire dès le début des années 1990 sous le nom de Made In Eric en développant le concept de « corps objet » sous forme de performances.
À Fiac, c’est en observant le swing des golfeurs que l’image de la grande faucheuse s’est imposée. Restait à isoler, à mettre en évidence et à scénariser cet « ultra geste » en ajoutant un trou démesuré au parcours existant. C’est donc à l’intérieur d’une fosse creusée à la pelleteuse et baptisée trou n° 0 (à voir aussi comme une vraie fausse tombe), qu’il a demandé à deux soeurs jumelles dont l’une est dissimulée sous une ample cape, de mimer l’entraînement du coach au swing pendant trois jours. Non content d’avoir enterré la mort, il a littéralement figé ou arrêté son geste dans un mouvement pendulaire perpétuel. Le swing étant aussi ce moment de grâce où le musicien fait balancer le rythme pour sortir de la dualité binaire, on peut estimer qu’Eric Madeleine a su domestiquer et transcender la mort dans une construction symbolique et sociale réinventée. Ce qui, dans nombre de cultures extra-occidentales, correspond à une ouverture sur l’au-delà et à d’autres dimensions ou niveaux de conscience.
Encore faut-il au préalable, comme c’est le cas ici, avoir neutralisé et outrepassé ses peurs les plus viscérales.

Revoir la matrice sacrificielle

Joachim Montessuis et ses hôtes ont tenté et réussi de façon assez magistrale une aventure post-mortem. Tout a commencé par un acte sacrificiel, celui du coq de la maison qui devait sans trop tarder être écarté du poulailler pour prévenir les effets de la consanguinité. Si bien que le rituel s’est imposé de lui-même. Le coq a donc été immolé sur un autel improvisé. Mais c’était pour mieux réapparaître dans l’installation que Joachim Montessuis lui a consacrée dans le grenier de l’ancienne ferme où il était reçu. Au-delà d’un hommage, il s’agissait d’accompagner le mort dans l’expérience du trépas en prenant modèle sur le Bardo, le livre des morts issu de la culture tibétaine. Ainsi, après avoir gravi les marches d’un l’escalier de bois, le visiteur pénétrait dans un espace saturé de lumière, de son, et à l’atmosphère suffocante due aux tonnes de sel recouvrant le plancher.
Associé à une seule source de lumière aveuglante, le chant du coq qui avait été enregistré au préalable de sa funeste disparition, hantait les lieux à la manière d’une complainte d’outre-monde. Le tout était orchestré de manière à provoquer une perte de repères temporels, spatiaux et physiologiques par l’immersion physique et mentale du spectateur dans un univers fantastique. L’une des images qui pouvait alors venir à l’esprit est celle d’une sorte de gouffre, ou de tunnel lumineux et sonore, tel qu’il a pu être décrit dans les fameuses expériences de mort imminente. Aux deux extrémités symboliques de ce tunnel, Joachim Montessuis a convoqué deux mystères fondamentaux. Le premier, celui de la matrice originelle des rituels de procréation et d’immolation, a été identifié au sacrifice humain. À ce sujet, il a même été envisagé que les premiers rois auraient été des rois morts, auxquels on aurait progressivement substitué l’animal sacrificiel. À l’autre bout du tunnel entre en scène le Bardo. Ce guide des voyageurs dans les autres mondes a pour fonction d’enseigner l’art de mourir, d’initier les rites destinés à exorciser, consoler et fortifier le mourant et surtout, à le préparer aux expériences de la mort en évitant les pièges des autres mondes. Dans une troublante triangulation transculturelle et transhistorique, Joachim Montessuis a su réveiller, « transversaliser » et réinventer un processus sociobiologique et mental matriciel de la civilisation humaine.

Transe visuelle et ondes Alpha

Au-delà (ou en deçà) de toute mythologie, l’exceptionnelle expérience du fascinant tunnel a pu être vécue de manière très concrète grâce au projet conjoint du groupe Étant Donné (Eric et Marc Hurtado), associé à Shiraz el Khairi et aux fameuses Dreamachines de Brion Gysin, les premières oeuvres de l’histoire de l’art conçues pour êtres vues les yeux fermés. Là aussi le visiteur devait se plonger dans une sorte de chambre noire. Attiré par une sonorité vrombissante, il découvrait à l’intérieur un ensemble de sculptures translucides de Shiraz El Khairi réalisées à partir d’ombres humaines tracées puis moulée en résine à même la terre.
Relevées puis suspendues dans l’espace, ces ombresmatière (symbolisant l’âme de l’individu) devenaient autant de corps diaphanes palpitants de lumière sous l’effet stroboscopique émanant de trois Dreamachines. Ces instruments conçus par Gysin dans les années 60 ont été ressuscités et reconstitués à l’identique par Étant Donné. Ils sont composés d’un cylindre ajouré éclairé de l’intérieur par une ampoule, en rotation sur un socle. Le spectateur était invité à se positionner face aux machines (entre 30 et 40 cm) de manière à laisser advenir à travers ses paupières une pléiade d’événements et de motifs luminescents rémanents : phosphènes, post-images, hallucinations diverses, dont le mystérieux tunnel sous la forme d’un vortex pulsatif. Ces apparitions de l’ordre de la transe visuelle sont dues au fait que la rotation des machines est indexée sur la fréquence des ondes Alpha de notre cerveau. Les ondes Alpha correspondent à un état intermédiaire entre veille et sommeil, à la lisière du conscient et du subconscient. Pourvoyeur d’images, cet état très particulier de symbiose physiologique et mentale est reconnu pour être favorable à la réceptivité, à la création, et à l’exploration atypique du potentiel cognitif humain. Il a aussi été attesté qu’à travers les ondes Alpha, le mécanisme électromagnétique du cerveau pouvait être influencé par certaines énergies telluriques ou par l’activité solaire, elle-même déterminée par d’autres corps planétaires, stellaires et galactiques. Ce qui expliquerait pourquoi certains expérimentateurs de cette oeuvre ont eu la curieuse sensation d’entrer en vibration avec le cosmos.

Fertiliser le temps

Cette conscience si particulière de l’appartenance symbiotique à un univers élargi et d’un fonctionnement interdépendant, voire d’une réciprocité entre l’humain et le cosmos se serait établie par l’intermédiaire de rites cosmiques qui auraient progressivement supplanté et absorbé les rites totémiques. Les rites totémiques auraient, dans un premier temps, été chargés de garantir les besoins vitaux et d’assurer les systèmes de reproduction et de survie. Comme en s’identifiant par exemple à un animal ou à un élément naturel, pour devenir son équivalent et s’assurer ainsi sa bienveillance. Les rites cosmiques partagent cette fonction mais avec une mission plus large qui est de créer, maîtriser et par là garantir, la bonne marche du monde. C’est-à-dire de l’univers dans son entier en réinventant une conscience de l’unité terrestre et céleste. Ces rites ont aussi pour particularité d’avoir inventé et codifié les rapports de pouvoir entre les dieux et les hommes, puis entre les hommes eux-mêmes quand le chef ou le Roi s’est revendiqué d’une essence divine. Les propositions de Christine Laquet dédiées au temps et à la fertilité, réactualisent ces mécanismes en les prolongeant par deux problématiques contemporaines : le lien à rétablir entre l’urbain et le rural, et à une autre échelle, entre l’Orient et l’Occident. Et ceci, en croisant des perspectives à la fois imaginaires, spirituelles et politiques. À cet effet, elle a conçu une sorte de circuit rituel articulé sur trois figures principales : un moine bouddhiste symbolisant la méditation et l’ascétisme, une clepsydre à blé accordée sur la temporalité du rite de l’exposition et un autel de fécondité où elle a disposé des amulettes sexuelles et phalliques sur le mode du Palat Kick thaï, dont la fonction magique peut être d’attirer le client, de rendre fertile ou de chasser les serpents. En exergue, une vidéo réalisée à Bangkok montre le curieux rituel imposé par le Roi de Thaïlande aux populations qui consiste à figer toute activité du pays deux fois par jour, le temps d’une sorte de minute de silence, en hommage à l’hymne national et à sa propre personne. Si cet ensemble a bien pour dénominateur commun la maîtrise du temps, il met en opposition deux types de pouvoirs qui assurément n’ont pas la même dimension poétique. L’un est fondé sur la contrition, la contrainte, le respect forcé et la peur, l’autre sur l’énergie vitale et l’imaginaire érotique. Gageons avec Christine Laquet que la magie sympathique du second est à la fois plus féconde, plus propice à une mutation fertile de notre rapport à l’univers et à l’éveil d’une conscience cosmique.

Transmutation cosmo-tellurique

En tant que performeuse, Edwige Mandrou a développé une pratique assez intense des mécanismes du rituel et de la transe. De même qu’une perception extrêmement sensible du potentiel énergétique des flux qui traversent les êtres, les choses et les éléments. Particulièrement attentive aussi aux divers symbolismes culturels qui les habitent, elle orchestre la complexité de ces paramètres de manière à la fois synesthésique, intuitive et inspirée. L’univers qu’elle a réorganisé à Fiac reposait sur les processus d’initiation, de divination, d’offrande et de transmutation. Son premier travail a d’abord consisté à trouver une nouvelle respiration de l’espace-temps où elle intervenait en l’installant dans une dimension cyclique et non plus linéaire. Pour faire germer cette situation, quelques semaines avant l’exposition, elle a inauguré avec la famille le rituel divinatoire du Yi-King, le livre chinois intitulé Le classique des changements ou Le livre des transformations. Les deux premiers héxagrames tirés par le couple ont aussitôt été transplantés dans le jardin avec du blé de façon à êtres sortis de terre, de part et d’autre d’un tas à offrandes, au moment de l’exposition.
Cette opération a été complétée par la réalisation d’un portrait de famille en morphing où les individus se transforment et se fluidifient dans une identité unifiée et continue.
En contrepoint, une vidéo installée dans les soubassements de la maison montrait un oeuf originel doté de pulsations respiratoires. Après avoir en quelque sorte réinstallé l’âme et la matrice des lieux, Edwige Mandrou a monté un tipi à l’extérieur de la maison, où pendant les trois jours de l’exposition, elle a proposé aux visiteurs des séances personnelles de divination. Transformée en femme-mage, l’artiste a en fait réinventé tout un système de liaisons symboliques, sociales voir énergétiques entre les protagonistes (famille, visiteurs, elle-même), les éléments et l’univers, en fusionnant deux cultures fondées sur des rites totémiques et cosmiques.
En Orient, le Yi-King est avant toute chose, une recherche spéculative cosmogonique symbolisée par le cercle tourbillonnaire du Yin et Yang qui figure la fusion, la transformation des contraires, des énergies et des dimensions terrestrescélestes.
S’élevant lui aussi sur la base du cercle qui représente le sol et la terre, le tipi a été conçu par les Nord Amérindiens à la fois comme un moyen de transport et comme un habitat dont les parois représentent le ciel.
Les perches qui tendent sa structure sont considérées comme autant de chemins vers la dimension spirituelle et le monde interstellaire originel. Dans cette recomposition cosmologique, l’artiste avait d’ailleurs pris soin d’utiliser le même matériau de bambou pour les bâtonnets des héxagrames et l’ossature du tipi. Comme pour mieux assurer le potentiel de mutation cosmo-tellurique de son dispositif.

Terre, Eau, Feu, Air et Cosmos

L’approche transculturelle et transcivilationnelle est à la fois l’une des clefs et l’une des perspectives de développement du programme Trans-Rituel. Même si l’on assiste à un renouvellement des pratiques trans-rituelles dans le monde occidental, il reste évident que leurs dimensions originelles et fondamentales ont été éradiquées de l’horizon de notre pensée. Historiquement et « techniquement », ce triste phénomène peut être comparé à celui de la réduction de la biodiversité. D’où l’invitation de la culture Baul à la table des artistes essentiellement occidentaux, qui jusqu’à présent ont été invités à Fiac. Cette précieuse présence vient parachever et dans une certaine mesure signer cette première édition de Trans-Rituels où les apports extra-occidentaux multiples ont nourri les artistes et leurs projets. Jusqu’à parfois transgresser les limites que l’on assigne à l’art dans notre conception occidentale de la culture. Originaires du Bengale, les Bauls sont justement connus et reconnus pour le rôle transgressif qu’ils jouent au sein même de leur société. Poètes, chanteurs et danseurs, ils exercent leur art de village en village tout en assurant une fonction organique de régulation des tensions individuelles ou collectives. Pratiquant la transe physique et vocale, leur nom issu du sanscrit « batul », signifie littéralement fou ou ivre de vie et d’aspiration divine.
Mais les Bauls préfèrent les humains aux divinités.
Ils fustigent les dogmes religieux, conspuent les systèmes de caste et abordent la spiritualité en termes érotiques.
Leur philosophie et leur art de vivre sont fondamentalement transculturels puisqu’ils se sont inspirés à la fois du Bouddhisme, de l’Hindouisme et du Soufisme. Leur rapport au divin repose sur la vie terrestre, sans réincarnation, ni rédemption ou ressuscitation aucune. Leur cosmogonie est fondée sur la symbiose de l’homme avec les éléments et la dimension cosmique de l’univers qu’évoque leur conception des cinq « voûtes » de la vie. À Fiac, à travers les différents rituels, concerts et repas qu’ils ont offerts, Paban Das Baul et Mimlu Sen ont plongé le village dans une ambiance très particulière. Une sorte d’atmosphère symbiotique, un nouvel air quasi palpable de régénération individuelle, sociale, spirituelle et cosmique.

Vers la Transcréation ?

Nous venons de voir à quel point la réouverture d’une perspective conjointe de la transe et du rituel pouvait cristalliser d’autres dimensions symboliques et cognitives. Non seulement pour ré enchanter le monde, mais surtout pour assurer une fonction d’autorégulation à travers un processus de réinvention permanente de modèles de co-évolution entre l’homme et son environnement. Il est clair, au regard de la richesse et de la justesse des propositions artistiques issues de Trans-Rituels 1, que l’on assiste à un renouvellement des fonctions organiques de la transe et du rituel. Comme s’il y avait une revanche de ces deux entités. Il est vrai aussi que notre société qui se veut avant tout technique, rationnelle et marchande, a du mal à percevoir les rites les plus subtils qu’elle engendre et a tendance à occulter leur portée à la fois symbolique et mentale. En particulier à l’égard de ses propres artistes et du rituel même de l’art contemporain, bien que leur statut, l’attention et les valeurs qui leur sont données, aient considérablement évolué. Mais cela fait aussi partie de la mécanique du rite. À travers lui, une société prend sans doute conscience d’elle-même, mais d’une manière peut-être indirecte, différée, après s’être en quelque sorte réfléchie dans le monde immatériel. C’est l’un des défis majeurs que doit relever la civilisation occidentale dominée justement par le strict et radical contraire de l’immatériel : le matérialisme consumériste. D’où l’importance capitale de réinvestir la transe et le mot « trans », de manière à la fois sémantique, symbolique, et opérationnelle.
En réponse, le concept de Transcréation participe à un nouveau type de connaissance où la poésie et l’art (re)trouveraient une place prépondérante dans la connaissance de la face cachée de la réalité. Cette connaissance nous fait cruellement défaut aujourd’hui pour relever les nombreux défis économiques, politiques, sociaux, culturels et bien entendus environnementaux, auxquels l’humanité est confrontée.
Pour cela il faut recréer une aptitude à la vision et à la fonction imaginative pour commencer à « reprogrammer le cerveau ». C’est pourquoi le processus d’installation d’une forme de Transcréation nécessite d’opérer une synthèse dynamique entre l’art et la poésie, l’épistémologie et la métaphysique.
C’est-à-dire en dépassant l’antagonisme entre les principales formes de savoir que sont l’art et la science. Pour le penseur roumain Pompiliu Craciunescu, la réhabilitation de la poésie et de l’art est même le seul moyen de retrouver une capacité de projection dans un devenir. C’est la voie de la connaissance transcosmologique, une « cosmologie de visions cosmologiques » qui correspond à une nouvelle conscience transversale de notre rapport mental aux différents niveaux de réalité du monde extérieur. Il semble que les oeuvres et les énergies libérées à Fiac pour Trans- Rituels 1 aillent dans ce sens et donnent une réalité à la fois concrète et pratique à ces concepts. Et ceci, jusque dans leurs incidences sur le comportement coutumier des habitants.
Pour preuve, le rituel de transmission qu’ils viennent d’inventer afin de passer le relais aux familles qui recevront les artistes de Trans-Rituel 2. Les invitant à une soirée festive ils ont réalisé un radeau avant de l’immoler par le feu sur la rivière qui borde le village. Dans cet intermédiaire poétique et flottant, entre terre, air, eau et ciel, les scories du brasier sont venues tutoyer les étoiles.

 

__________________________________________________________________________________________________

Les artistes

Michel Giroud, Charles Dreyfus, Eric Madeleine, Joachim Montessuis, ETANT DONNES et Shiraz El Khairi, Christine Laquet, Edwige Mandrou, Mimlu Sen et Paban DAS BAUL

__________________________________________________________________________________________________

Le commissariat

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

Fiac OFF 2006

 

 

 

 

 

 

FIAC   OFF   2006

 

hulautoff

LES VACANCES DE MELLE HULAUT
——————————————
Film d’Anabelle Hulaut
durée : 1h, année 2006
Projection du 15 juillet au 15 septembre 2006 à Fiac
——————————————
Ce film s’inscrit dans le processus
de rencontres qu’Anabelle Hulaut provoque, organise, s’approprie et lie entre elles.
Il est le point de convergence de divers éléments du travail artistique qu’elle mène depuis quatre ans.
Un acte fondateur : « Prête moi ton L »,

Un échange de lettres, permit à l’héroÏne de changer son patronyme, elle se nomme désormais Hulaut. Ce geste se conclut par un mariage. Puis, il engendra toute une série de rencontres, une sorte de va et vient, un trafic permanent, entre la fiction et des éléments de sa vie quotidienne.

Les deux personnages principaux,
Melle Hulaut et le détective Hulaut vaquent à des occupations variées (partie de pêche, construction d’une cabane). Leurs apparitions, souvent furtives complices ou célibataires, forment un chassé-croisé.
Petit à petit, se révèle la complexité d’un personnage énigmatique, elliptique, à la fois un et multiple.
Ce film est une sorte d’en(quête) qui nous échappe sans cesse, ou tout au moins chaque fois que l’on croit en atteindre l’issue.
D’ailleurs, ceci n’est pas un film, il en a la forme, mais sa mise au point reste floue.
Emmanuelle Cherel
——————————————
Je remercie toutes les personnes qui ont participé au film et pour la projection du film à Fiac, je remercie plus particulièrement l’AFIAC, l’Ecole de beaux-arts de la Ville du Mans, Patrick Tarres et David Michael Clarke.

Anabelle Hulaut

Laurent MORICEAU – + si affinité 2006

Laurent Moriceau

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez familles de bénévoles épicuriens et bricoleurs

« LES RÉUSSITES DE LA BOUCHE »

Les lecteurs : famille Schincariol (Cathy, Alain, Laure et July), Anna Burlet, Richard,
Marion et Sophie Vautier, Marie Creismeas, Odile Fabries, Sylvie Lucienne,
Florence Fauré, Christophe Monroy, Rosi Hoffmann.

mauriceaulecteurs

Remerciements à Yves De Williencourt, Association “La haute voix”
Travail réalisé avec la complicité de Pierre Giquel.

Les réussites de la bouche

(1er épisode)

Entrée

Un texte lu 1

Plat de résistance

“Offre ta joue telle” 2
(textes tisonnés sur viande blanche)

accompagné de

Courgettes à la Crétoise
Marinade de poivrons
Carottes à la Marocaine

Dessert

Merveilles accompagnées de sorbets et de coulis exotiques

parfums au choix : cactus citron vert, carotte miel cumin,
fiac, thé Thaï rouge, coco curry, miel fleur de lavande.

——————————————————
1 Texte de Pierre Giquel

Les lecteurs : famille Schincariol (Cathy, Alain, Laure et July),
Anna Burlet, Richard, Marion et Sophie Vautier, Marie Creismeas,
Odile Fabries, Sylvie Lucienne, Florence Fauré,
Christophe Monroy, Rosi Hoffmann

Remerciements à Yves De Williencourt. Association “La haute voix”

2 Travail réalisé avec la complicité de Pierre Giquel

1. Le repas /

Entrée
Texte de Pierre Giquel

Dans l’été liturgique
La prière tremble à pic
Attendre est une épreuve
Quand lèvent les saveurs

Mets ce met sur mes lèvres
Tu me privais d’un verre
Dans ton dos j’en bois deux
Ou trois volés au vent

Avant que les baisers
De feu ne te chiffonnent
Le fond de ton gosier
Qu’une brise ne sonne

Je chante le supplice
D’un manque qui gémit
Sous la dent carnivore
Ô mourir par la faim

En sachant qu’une fille
Vous la prépare rouge
Saignante dans son jus
En sachant qu’un garçon

Avec délicatesse
L’entoure de soleils
De parures canailles
De fumantes batailles

Car l’appétit caresse
Le plus dur d’entre nous
Détends-toi rien ne presse
Un vent joyeux nous frôle
Goûte la mon entrée
Est virtuelle la beauté
Sans préfixe époustoufle
La vie vive nous saoule

L’insomnie est une fête
Nos réveils improbables
Nous mêlerons nos sauts
Nos chants et nos ébats

Consommant des vertiges
Richement dévêtus
De petites vertus
Nous ploierons sur la tige

Je chante le supplice
D’un manque qui gémit
Sous la dent carnivore
Ô mourir par la faim

En sachant qu’une fille
Vous la prépare rouge
Saignante dans son jus
Prévoyant qu’un garçon
Avec délicatesse
L’entoure de soleils
De parures canailles
De brûlantes batailles

Car l’appétit caresse
Le plus dur d’entre nous
Détends-toi rien ne presse
Un vent joyeux nous pousse

Plat de résistance

mauriceaubranding2mauriceaubranding4mauriceaubranding

 

mauriceaubranding5mauriceaubranding3

Dessert

Ce dessert a pour origine le projet “do you moule à merveilles“ (Laurent Moriceau + invités )
Celui-ci propose à différents créateurs de s’approprier et de réinventer le traditionnel “moule à merveilles“.
Production Musée Calbet de Grisolles, 2005 :
1 : Florence Doléac, 2, 3 : Olivier Nottellet, 4 : Jacques Halbert, 5 : Pierre Giquel, 6 : Claudine Puget, 7 : Laurent Moriceau

mauriceaulesmerveilles

mauriceaulesmerveilles6 mauriceaulesmerveilles3 mauriceaulesmerveilles2 mauriceaulesmerveilles4 mauriceaulesmerveilles7

2. Le concours des belles tables fiacoises /

Les participants
Marion Pinaffo et Marthe Drucbert, Caroline Puig, Rafael, Gabriela, Stéphanie, Cédric et Emmanuel,
Nelly et Jean-Pierre Boyer, Sandra et Julien Boyer, Angélique et Amandine Fontaine, Aurore et Sébastien Alibert, Christophe Pradelles, Sylvie et Bruno Berthoumieux, Vincent Boyer, Dominique Muratet, Paul Berthoumieux, Françoise et Marivyne Andrieu, Lucie Devèse, Sabine Bernaud, Agnès Pintchman, Nicolas Masure et Françoise Galtier, Naomie et Anna Burlet, Daisy Alvergne .

mauriceauconcours2 mauriceauconcours4

 

mauriceauconcours8 mauriceauconcours6

mauriceauconcours5 mauriceauconcours8 mauriceauconcours

La lauréate

mauriceauconcours7

Marion Pinaffo et Marthe Drucbert pour leur table
intitulée “Il faut arroser ça”.

3. Le Fiacois /

Le fiacois est un appareil à “distiller” le vin grâce à la congélation.
Présenté au “repas du dimanche” le 25 juin 2006 .

mauriceaufiacois1

mauriceaufiacois2

Jean-Luc FAVERO- + si affinité 2006

Jean-Luc Favero

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez Nicole et Jean-Louis Cartigny

« À l’instar de l’habit qui contient le corps, »

Je me suis efforcé d’habiller et de proposer des volumes contenant des situations de la réalité.
Le sujet n’a pas eu d’importance si ce n’est de m’avoir fait réagir.

favero8

Je m’interroge sur le poids, la grosseur que l’on a pris dans le temps avec tous les biens matériels qui nous entourent. Nous sommes devenus extrêmement lourds. Je pèse déjà une voiture, plusieurs machines à laver, etc. Je ne peux vivre dans ce milieu sans le questionner comme mon ancêtre questionnait les parois de la grotte préhistorique. Mais vivre c’est s’adapter à son milieu, au matériel, à la propriété, à tout ce qui nous fait aujourd’hui poncer, polir ou tondre.

En fait je cherche à donner d’autres formes à des actions et à des fonctions. D’où le lien, dans mes derniers travaux, au quotidien, au domestique, au ménager, à la vie de couple aussi. Il y a un nouveau mariage entre l’homme et la machine. Jusque-là la machine était adaptée à l’homme. De plus en plus, c’est l’homme qui doit s’adapter à la machine.
Je veux voir ce que cette situation peut créer comme chimères et quel nouveau centaure va naître de notre condition contemporaine. Si l’on est vraiment vivants, l’on se doit de créer une nouvelle mythologie pour donner un sens à tout ça. C’est pourquoi je me nourris de tous les moments de la vie quotidienne. J’aime les mots « domestique », « ménage », « ménager » et leurs glissements. Ce qui crée chez moi une sorte de ménagerie, par un retour à l’animal dans des formes zoomorphes.
Jean-Luc Favéro (extrait d’un entretien avec Philippe Ségur).

favero5 favero4 favero3 favero2 favero1

favero6

favero7

 

Alexandre Ovize – + si affinité 2006

Alexandre Ovize

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez Martine, Michel Deveze et leur fille

« CAMPING CROOT, 2006 »

Projet
Le camping car comme point de départ à la réalisation d’un leurre. Un parc, géant, ou le camion rugissant devient une majorette ridicule. Tromper le spectateur, accroître cette disproportion en enfonçant cette masse dans la terre, sorte d’épave touristique des temps modernes.
D’où vient le choc ?

Peut-être de cette forme frêle et pathétique qui se hisse sur le dinosaure et devient
une sorte de structure de foire aux allures d’épouvantail synthétique et camouflé.
Une prothèse/image, une excroissance de réalité, point de jonction entre
ce parc naturel et cette imitation d’intérieur que représente le auto-escargot.

ovize

Descriptif de l’installation :
Installation : bois, linoléum, acrylique, camping car

 

 

Armand Jalut – + si affinité 2006

Armand Jalut

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez Caroline, Raphaël PUIG et leurs enfants

« Peintures »

La peinture véhiculant avec elle une notion décorative, il me semblait à propos de m’immiscer au cœur de l’espace privé. C’est précisément afin de contrarier ce stéréotype que le salon m’est apparu comme étant le lieu où le public serait le mieux confronté à l’œuvre. Au cœur de la décoration existante, les peintures mettent en relation la culture familiale, l’intrusion de l’œuvre et le regard du spectateur. Le choix des sujets a été précédé par la prise de photographies, simultanément à la prise de contact avec la famille Puig.

jalu1

Me laissant guider lors de la visite des lieux, j’ai retenu l’attachement de mes hôtes à leurs chevaux et leur cadre de vie attrayant, stigmatisé par la petite rivière en contre bas du jardin. J’ai voulu exploiter leur dimension pittoresque, et dépasser l’aspect suranné. Mon intention était de produire de l’étrangeté à partir du merveilleux.

jalu5

En résulte un poney inquiétant, une rivière « courbesque », une matière filandreuse, des chairs malades…

jalu2

Cette éclosion du fantastique provient du caractère instable des peintures.
La variation des formats, les cadrages ambigus, les productions de ressemblance et de disjonctions, l’émergence de l’informe contribuent à l’élaboration d’un climat énigmatique.
Si elles semblent instaurer une connivence avec le spectateur, elle s’en détourne par l’absence de logique narrative et l’impossibilité de faire un commentaire rassurant.

jalu3

Francoise QUARDON- + si affinité 2006

Francoise Quardon

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez Agnès Pintchman, Nicols Masure et leurs enfants Thomas, Marie et Emilie

« La mort de la phalène »

« Les phalènes qui volent le jour ne méritent guère le nom de phalène ; ce sentiment de nuit d’automne et de lierre en fleurs que suscite en nous le plus vulgaire des papillons de nuit, endormi à l’ombre du rideau, elles ne le font pas naître. Ce sont des créatures hybrides, ni gaies comme les papillons, ni sombres comme les créatures de leur espèce ».

Une famille, un couple de vétérinaires, trois enfants, un chat, un chien.De prime abord, ayant feuilleté les catalogues des manifestations précédentes, la grandiloquence sentimentale des uns et des autres me hérisse le poil. Drôle de lieu pour une “rencontre” !
Je pense immédiatement à Deleuze, à son dégoût des animaux “familiers et familiaux”, à son intérêt pour les petites sales bêtes (tiques, puces…).
Nous sommes étrangers les uns aux autres, mes hôtes et moi ; eux aussi sont un peu dubitatifs.

quar1

Nous nous accordons très vite à un fonctionnement de bonne entente, distanciée et respectueuse. Leur maison est ouverte sur l‘extérieur, comme eux, avec simplicité. Le petit garçon de la maison me prête sa collection d’araignées en plastique…
C’est décidé, je me transformerai en Arachnée, peut-être la première femme-artiste, elle qui a défié la déesse, les canons du beau, l’éternité et pour cela a été punie et transformée en vilaine bestiole à huit pattes
Voici donc « La mort de la phalène », clin d’œil très sérieux à l’altérité, à l’animalité humaine, à la force de subversion de la femme, à la disparition.
Imprimée sur un voile traversé par la lumière, je disparais… un peu, je suis juste de passage, à cet instant.

quar3

« Pourtant, après une pause due à l’épuisement, les pattes s’agitaient encore.
C‘était superbe, cette ultime protestation, si frénétique qu’elle réussit finalement à se retourner. Les sympathies, bien entendu, allaient toutes à la vie et j’étais étrangement émue – alors qu’il n’y avait personne pour s’apitoyer ou le savoir – par cet effort gigantesque d’une phalène insignifiante pour s’opposer à une puissance ainsi démesurée, afin de conserver ce qui n’avait de valeur pour personne, n’intéressait personne. Une fois de plus on voyait en quelque sorte la vie, une perle de vie très pure ».

Françoise Quardon, février 2007
Les passages en italiques sont extraits
de « La mort de la phalène » de Virginia Woolf

quar5

Cyril LEPETIT – + si affinité 2006

 

Cyril Lepetit

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez Daisy Alvergne

lepetit2

Des premières caresses au dernier soupir, il me semble que nos désirs auront évolué. C’est peut-être pour cela que lorsque je m’attache à effleurer le naturel et la complexité du désir – cette perpétuelle tentative de nous réinventer – je développe mes projets suivant un principe d’effilement. Un sentiment en appelle un autre et quelque chose se construit, ou plus précisément se développe selon les pensées, les situations, les individus rencontrés
+ si affinité : mon intervention s’est composée de plusieurs éléments : rencontres, notes, objets, actions, peintures. Ils sont à la fois autonomes, mais forment aussi un tout, présenté à Fiac durant l’été 2006, ils peuvent être présentés aussi sous la forme d’une nouvelle installation
En quelques lignes et quelques images, je tenterais donc de restituer avec l’Infidélité Respectueuse de ma mémoire, les étapes qui ont marqué l’élaboration de cette pièce développée avec et dans l’espace privé de mes hôtes Daisy et Axel.

Reproduction au jardin d’orties

Daisy loue une petite maison sur la place du village de Fiac. Elle y vit depuis plusieurs années avec son fils Axel âgé de 16 ans.
Lors de notre première rencontre, Daisy m’a fait part de son intérêt pour la méditation et l’importance de cette discipline dans son quotidien et dans celui de ceux qui l’entourent. Science ou croyance, art de vie sous l’influence du tantrisme, elle vit,
elle soigne en usant de la méditation et du recours aux « médecines douces ».
Ainsi, nos premiers échanges nous ont amenés à parler des vertus cachées de nombreuses plantes. Répondant à ma curiosité, Daisy m’a préparé pour mon premier repas sa recette des galettes aux orties. Axel, simplement, préférera l’intimité de sa console de jeux vidéo.

Durant les semaines qui ont suivi cette rencontre, j’ai gardé à l’esprit la dite « mauvaise herbe » à laquelle j’avais goûté.
Au cours de recherches, Je découvrais qu’elle joue aussi un rôle primordial dans la reproduction du papillon le plus répandu en France.
Ainsi, l’ortie en tête, le projet que j’étais venu développer à Fiac s’est mis à germer.

Dans l’arrière cour de la maison, nous entreprendrons de créer un jardin-bouquet
d’orties, vivaces et séchées, allant de la vie à la mort. Métamorphoses et papillonnages
y prendront places, les frontières entre le masculin et le féminin n’y seront que plus légères. Daisy y préparera avec attention et « amour » de petites galettes.

(1) Porte d’entrée diapason.
Un jardin ludique qui aura pour première clé une porte diapason. Porte ou bien ouverture ? Cet élément ne remplira pas la fonction de fermeture. Ayant en son centre une petite arche par lequel les visiteurs pourront pénétrer, il constituera par conséquent une porte toujours ouverte que chaque individu sera libre de franchir ou non.

lepetit1

(2) Les galettes d’orties.
L’herbe dont les fins poils irritent désagréablement la peau de qui la touche se transformera en mets original caressant le palet de qui le goûtera. Les visiteurs, une fois franchie la porte de la maison, passeront par la salle TV/jeux d’Axel où sera diffusé un petit film culinaire et animalier. Ils déambuleront ensuite dans le jardin bouquet. Au milieu des orties, un chemin les amènera à la fenêtre de la cuisine de Daisy, d’où elle servira ses galettes d’orties concoctées avec « amour ».

lepetit4

 

lepetit5

 

(3) Transplant et Métamorphose
« Les gestes utiles ne doivent pas cacher les gestes agréables » C.G. Jung
Afin de préparer les boutures pour la réserve/jardin/bouquet d’orties nous irons avec Sylvain, Pipo et Françoise, déraciner des brassées d’orties dans les fossés aux alentours de Fiac. Daisy méditera dans le jardin afin d’y amener sérénité et harmonie.
En effet, le papillon dépose sa larve sur la nervure centrale de la feuille d’ortie qui ensuite se referme sur elle-même. Celle-ci se noircit et se mue progressivement en chrysalide. La chenille se libère, le papillon prend la liberté.
Ayant caressé ma barbe de façon répétitive durant les deux dernières années, je décide de perdre cet apparat distinguant ma sage virilité. Je m’épilerai donc la barbe et celle-ci se transformera en une série le pinceaux.

lepetit3

 

www.cyril-lepetit.com

www.international-exhibitionist.org

Thomas Israel – + si affinité 2006

Thomas Israel

Fiac  2006  –  + si affinité

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Pascal Pique

Directeur artistique : Patrick Tarres

L’artiste était reçu chez Sabine Bernaud et Christophe Tellez

« Carresse-moi!»

——————————————
Descriptif de l’installation

Installation interactive sous tente (3x2m)
——————————————
Projet
Avec « Caresse-moi! » le visiteur pénètre sous une tente dans un espace fantasmatique, où le rêve qu’il visionne sera influencé par ses mouvements. En effet, chacun de ses gestes laisse des traces sur l’écran comme autant de caresses virtuelles sur
le corps des acteurs, caresses qui vont déterminer la suite des événements :
un rêve sensuel avec l’homme, la femme où les deux.

isra3
“With ‘Caress me’, we are in a phantasmagoric space wherein the visitor will
complete the rest of the dream towards
the man or the woman by making movements in front the screen, leaving traces – like
virtual caresses – on my actors’ bodies” T. I.

isra1

Stomach Cave
installation vidéo (5’25 » en boucle)

Dans un flux et reflux invitant à la contemplation, un corps de femme apparaît du néant puis y retourne. En plus du plaisir enfantin de l’apparition de l’interdit,
la distorsion du temps permet à l’image
de délivrer tout son suc.

(Vidéo et article sur www.exporevue.com)

In a strange flow, inviting to contemplation, a woman’s body appears from nowhere
then disappears. There is the childish
pleasure of the appearance of the prohi-bited object, and a distortion of time so that the image delivers all its juice.

Afiac 2006 – Fiac (France) – 6-2006

isra2