Agnès Rosse
Lautrec 2014 – Des artistes chez l’habitant
Un événement de l’AFIAC
Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : William Gourdin et Paul de Sorbier
L’artiste était reçu chez Françoise Van Uffelen.
Avec Agnès Rosse, c’est l’atelier du monde qui se déplace chez la douce Françoise Van Uffelen, au centre de Lautrec, non loin de l’église, dans une très vielle demeure qui a passé les siècles et en a gardé les traces architecturales auxquelles se sont ajoutés les stigmates et souvenirs d’une opulente vie. La douceur et la singularité du travail présenté sont à l’image de la relation tendre et affectueuse qu’ont pu vivre les deux protagonistes. La première ouvrant avec pudeur son intérieur et son formidable jardin, la seconde s’en accaparant avec sincérité et respect. Le jardin ombragé sert à Agnès Rosse de carrefour intérieur, pour dispatcher tout autour dans les espaces intermédiaires de la maison intime un ensemble d’installations et de vidéos, où la place chère de l’animal et de notre rapport à lui se joue de nos sens d’homo sapiens dominateur et destructeur.
À l’entrée dans le jardin d’hiver, deux projections se croisent. L’une présente la construction/rédaction par des fourmis d’un lettrage fait de pattes de crevettes achetées la veille au marché de Lautrec, où il est possible de lire, après un travail laborieux mais consciencieux de nos petites ouvrières dévouées, le mot ÉLÉPHANT. Sur le côté surgit alors l’image plein cadre du regard du plus grand des mammifères, nous regardant fixement avec cette larme toujours présente au creux de l’oeil.
Au-dessus sont suspendus deux régimes de bananes. L’atmosphère du lieu en cette saison est lourde, telle une serre tropicale. Une barrière nous empêche de pénétrer dans cette cage artificielle où l’image de l’animal trône. Les leçons moralistes de La Fontaine sont ici déjouées par le truchement de l’image. Le film est en effet monté à l’envers.
Plus loin, prolongeant l’allée du jardin, dans l’escalier à pan droit, a été installée une projection vidéo. Le public est invité à s’installer sur les marches ; commence alors un ballet étrange où les acteurs principaux sont les escargots et des coques vides de scarabée trouvées. Le premier est en symbiose complète avec une goutte d’eau qui lui glisse sur le corps dans un jeu de texture très charnel ; le second se fait chauffer jusqu’à l’embrasement. Les éléments du monde se font face entre chaleur et humidité. Le jeu de lumière et la dramaturgie de l’ensemble sont hypnotiques et physiques.
Enfin, de l’autre coté du jardin, où Françoise, assise, se repose à l’ombre d’un arbre quelque peu abasourdie par tant de flots humains, qu’elle laisse pénétrer pour la première fois chez elle, Agnès Rosse a accumulé une succession d’aquariums et de vivariums du défunt mari pour nous construire un mur semi-transparent dans lequel nous pouvons plonger en curieux et novice entomologiste de l’art que nous sommes. Agnès, en nouvel enfant adopté le temps d’un week end, joue avec la mémoire du lieu la plus intime et privée. Pêle-mêle, une vidéo de fourmis succède à une vue d’un horizon lointain diffusé sur un mini écran vidéo.
Des escargots dansent sur les parois, laissant leur bave suintante dessiner des entrelacs pollockiens. Des livres et coquillages finissent de compléter ce cabinet de curiosités. Sous cette véranda, c’est un véritable petit laboratoire qui nous est proposé, un atelier créé de toutes pièces par cet enfant étranger de passage, qui poursuit ici son voyage vers la découverte du monde. Deux étrangères se sont rencontrées et se sont découvertes. La magie de l’AFIAC a une nouvelle fois opéré.
Paul de Sorbier
Commissariat
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : William Gourdin assistant de direction Frac Midi-Pyrénées, chef de projet d’exposition et de diffusion en Région, et Paul de Sorbier directeur de la Maison Salvan à Labège.
Les artistes à Lautrec
Julien Salaud, Pierre-Laurent Cassière, Nicolas Fenouillat, Denise Bresciani, Agnès Rosse, Suzy Lelièvre, Le collectif IPN, Collectif Ding, Benedetto Bufalino, Linda Sanchez.