AFIAC/Café/Performance Enna Chaton

Le 6 Mai 2011 au café de Fiac

Performance d'Enna Chaton café de Fiac

REJOUISSONS-NOUS – performance à Fiac

Les êtres, les corps sont là, nus face à notre regard.

La nudité, récurrente dans le travail, crée au fil des années un univers de plus en plus décalé du monde actuel. Ici, les repères sont déplacés, la personne nue va sentir puis agir et se mouvoir avec plus de fragilité et de crainte que si elle portait un vêtement. D’une certaine manière je provoque une mise à nue, une confrontation (douce et à la fois brutale, frontale) face et avec soi-même, face et avec les autres, et avec le public. J’accompagne nue les participants lors de la prise de vue afin de ressentir à leur égale l’intranquilité de la situation. Vivre cette expérience est riche. Je tente d’ouvrir un lieu de travail permissif, ouvert, expérimental où l’être se révèle différent du quotidien, et, où chacun trouve une place, un rôle, s’y amuse le temps de la performance artistique : un espace de liberté ? Les participants explorent des territoires qui leur sont inconnus, ils inventent un vocabulaire, une langue, une façon de s’approprier le geste, le lieu, la nudité, leur présence crée une forme singulière. Depuis 2010, j’organise des événements éphémères, des performances qui montrent des prises de vues photographiques ou vidéographiques en public.

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AFIAC/Café/Exposition – Croquantes – Marie Labat

Du 7 octobre au 31 décembre 2011

Croquante Marie Labat Café de Fiac du 7 octobre au 31 décembre 2011

Au delà de son engagement politique assumé visant à questionner la place de la femme dans notre société, Marie Labat pose un regard à la fois tendre et sans concessions sur ses modèles. La parole, le corps et ses attributs sont montrés sous la forme d’icônes sociales et d’objets détournés qui traitent avec humour et poésie de la question des caractéristiques du genre. Proche des femmes qu’elle invite dans ses images, l’artiste dévoile leur mémoire individuelle et collective, leurs révoltes et leurs dénonciations. Si les images nous montrent une vérité lapidaire, paradoxalement, les objets/sculptures de Marie Labat érotisent, voire fétichisent le propos, faisant résonner cette exposition comme un brouhaha d’étonnements.

L’exposition « Croquantes » rassemble des œuvres plus particulièrement focalisées sur les femmes dans le monde agricole. Ce choix revêt une dimension autobiographique pour cette jeune artiste récemment diplômée à l’École Supérieure d’Art de Tarbes. l’ESA des Pyrénées / Tarbes.

Patrick Tarres

L’AFIAC organise la première exposition de Marie Labat, jeune diplômée des Beaux-Arts de Tarbes, ‘Croquantes’,  du 7 octobre au 31 décembre 2011.

AFIAC/Café/Performance | Nieves Correa

Le 4 Février 2011 au café de Fiac 21h

Création de Nieves Correa pour les AFIAC/Café/Performance le 4 février à Fiac.

Elle entre dans le demi-cercle éclairé formé par le public, un léger sourire aux lèvres témoin de son appréhension déjà communicative.
Elle porte un chemisier rouge à volants, un ruban relève ses cheveux.
A son poignet un bracelet porte épingles rouge rempli d’aiguilles noires.
Au milieu elle dispose une chaise, s’assoit. Elle pose les deux mains sur ses genoux, respire.
Elle fait glisser la manche de son chemisier jusqu’au coude, croise les pieds. Une à une, elle plante les aiguilles à tête noire dans la rondeur de son épaule. Il y en a cinquante et une.
Lorsqu’elle les retire, certaines font saigner. Le sang coule le long du bras, tâche le tissu rouge, jamais essuyé. Chaque aiguille enlevée soulage.
Elle entame la deuxième épaule.

Nieves Correa cherche a expérimenter des sensations très primaires, à la fois corporelles et intellectuelles. Elle se soumet à une douleur physique et impose à l’autre de la soutenir. Il appartient au public de décider de le supporter ou non. Selon l’endroit où l’on se situe, la performance se déroule différemment. Le face à face avec l’artiste évacue davantage le rapport aux autres membres du cercle, bien qu’il reste présent. Sur le côté, le spectateur est confronté à l’artiste au premier plan, au public au second. Celui-ci vit la performance en deux temps : le public situé sur le côté ne voit pas la performance sur la première épaule. Nieves Correa décide de la reproduire sur la deuxième.
La disposition s’adapte au lieu de la performance. Nieves Correa en proposant des chaises, n’a aucune idée de la manière dont le public va s’en saisir. Elle est uniquement à la recherche de proximité entre elle et les spectateurs. Dans le café de Fiac s’est formé un espace circulaire, délimité et clos. En formant un cercle, chacun se fait acteur pour l’autre qui le voit. Un rapport de corps à corps se crée alors entre le public et l’artiste ainsi qu’entre les membres du public eux-mêmes. Cette mise en abime de la vue au travers d’autrui autorise une double lecture : la puissance du regard du spectateur suggère un autre regard que celui qui nous est propre. Il y a ceux qui bougent, et ceux qui sont immobiles. Ceux qui parlent, ceux qui lui sourient, ceux qui décident de ne plus regarder du tout. C’est dans cette mise en espace et cette symétrie du regard que se développe la performance de Nieves Correa. Il semble que ce soit ces conditions formelles qui permettent à son travail de se déployer. Le public, dans ses réactions, est essentiel à la performance. C’est grâce à cela qu’elle se voit chargée de sens, et non l’inverse. Dans cet espace, créé par nous, par la lumière aussi, dans ce temps et cet acte, dans cet échange avec elle et entre nous, chacun fait face à son propre ressenti, subissant ou non l’influence de celui des autres. Cinquante et une aiguilles, c’est autant que son âge. Elle transmet ce qui fait d’elle une femme, avec ses angoisses, ses obsessions, ses espérances, qui se révèlent universelles. C’est ici, dans ces interactions, que se crée le ou les sens que chacun veut lui donner. Nieves Correa semble vouloir se détacher de toute référence précise. Au sein de la performance, c’est à chacun de construire ses propres références, au travers de ses propres mythes et peurs. Elle choisit de ne pas dire et de cette façon, il est difficile de cerner la nature de son geste.

Est-elle réellement dans une démarche non-maîtrisée ou bien est-elle en totale possession de son acte ? C’est justement au travers de cette femme là et de son acte si dérangeant et ambigu que chacun crée sa propre histoire, s’ouvre à ses propres symboles.
La performance de Nieves Correa se centre sur la relation avec et entre le public dans un temps donné et ici dans un espace clos. Ce qu’elle dégage de plus manifeste est la liberté d’interprétation dans une oeuvre en mouvement. A l’instar d’Umberto Eco, nous pourrions parler d’une oeuvre « ouverte ». « La poétique de l’oeuvre « ouverte » tend, dit Pousseur, à favoriser chez l’interprète « des actes de liberté consciente », à faire de lui le centre actif d’un réseau inépuisable de relations parmi lesquelles il élabore sa propre forme, sans être déterminé par une nécessité dérivant de l’organisation même de l’oeuvre. »

Mathilde Bardou

Traces | vidéo

AFIAC/Café/Exposition LOVNI INVASION Jean-Luc Favero

Du 14 janvier au 17 mars 2011 – Vernissage le 14 janvier à 18h30

Exposition AFIAC Le Lieu Commun de Jean-Luc Favero à l'occasion de son livre Lovni Invasion

L’AFIAC et Lieu-Commun présentent l’exposition LOVNIINVASION de Jean-Luc Favéro autour de la sortie du livre éponyme chez les Requins Marteaux.

Un multiple est publié à l’occasion et mis en vente le soir du vernissage au Lieu-Commun.

Deux expositions, 1 livre, deux RDV.

1 – Café de Fiac (81) :
Exposition Jean-Luc Favero du 14 Janvier au 17 Mars
Du Mercredi au Samedi de 8h à 12h et de 18h à 20h. Le Dimanche de 8h à 12h
Vernissage le Vendredi 14 janvier à 18h30
2 – Lieu-Commun (Toulouse) :
Exposition Jean-Luc Favero du 11 Février au 5 Mars
Parution du livre ‘Lovni Invasion’ en vente sur place.
Vernissage le 10 Février à 19h

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AFIAC/Café/Performance | Edwood

Le 7 janvier 2011 au café de Fiac 21h

Une performance d'Edwige Mandrou dans le cadre des AFIAC/Café/Performance

« Si «  la foule c’est le mensonge », alors, à l’instar de Diogène qui cherchait, muni d’une lanterne, un homme en plein jour, les performeurs nous interpellent invariablement en tant qu’homme et seulement en tant qu’homme. » Jean-Luc Lupieri

Répondant à une petite annonce d’habilleuse pour music-hall, je me suis récemment trouvé par hasard dans les coulisses d’une revue Toulousaine. Je crois avoir été bouleversé en tant que femme, par ces donneurs et donneuses de rêve. Pour répondre à la question qui sont ces danseuses de revue ? Dévoiler les trucs et les ficelles qui font de ces corps, que la société aime imberbes, des déesses de notre société de consommation, un corps sans faille mais tellement fragile. L’hommage à Guy Debord : Plus que de les mettre à jour dans une action performative, il s’agit aussi de mettre en lien l’intime et les masses médias :l’individu, seul devant son miroir, se préparant pour aller, travailler, sortir, s’adapter, se conformer au monde induit par le pouvoir des masses médias, et l’économie elle-même.  Edwige Mandrou

Traces | Vidéo

Notre point de départ n’est certes pas de rendre compte par des mots ou des concepts appropriés d’une réalité dont toute trace, à vrai dire – qu’elle soit écrite ou filmée –,  demeure, par essence, éloignée de ce qui fut vécu et éprouvé au moment même de son exécution. De fait, ce que nous pourrons dire de cette performance qui, je crois, a constitué un des moments forts du festival Live Action de Göteborg, doit être entendu comme un témoignage de reconnaissance vis-à-vis d’une œuvre qui, comme tout hapax, se perpétue seulement à travers l’empreinte occasionnée chez ceux qui y participèrent.
Ceci étant dit et avant de pénétrer au cœur même de l’action, nous allons, en guise de jalon, opérer un bref détour sur l’intitulé de la performance car, après tout, que peut bien signifier aujourd’hui un hommage à Guy Debord ? Pour faire court, lorsqu’on se réfère à Guy Debord, c’est le plus souvent en référence à La société du spectacle. Cet ouvrage, dont la lecture n’est guère facilitée par une terminologie s’avérant parfois très hermétique, constitue une critique radicale du capitalisme dont le stade achevé est, selon l’auteur, celui du spectacle. En fait, derrière le spectacle se cache en réalité le règne de la marchandise et de sa fétichisation éhontée dans une société dont la consommation exponentielle représente toute l’essence : « Le monde à la fois présent et absent que le spectacle fait voir est le monde de la marchandise dominant tout ce qui est vécu. » Partant de là, on sait que le film homonyme réalisé par Guy Debord en 1973 est construit autour du principe d’un détournement systématique des images. Ce détournement vise à accomplir une inversion de l’illusion initiale afin de rétablir la vérité du mensonge dont les images sont les véhicules. Si hommage il y a, c’est donc qu’Edwige Mandrou s’inscrit à la fois dans la continuité situationniste de cette critique du fétichisme de la marchandise, mais aussi, qu’elle en utilise explicitement les armes.
Pour le premier point, la pratique même de la performance constitue un positionnement radical contre la production de marchandises – fussent-elles malencontreusement des œuvres d’art. Je renvoie ici le lecteur aux analyses de Karel Teige qui dévoile dans quelle mesure le capital s’est approprié le monde de l’art et comment ce dernier sert désormais, avec parfois beaucoup d’obséquiosité, les desseins de son maître. Si la performance s’avère improductive en termes d’objet c’est bien que les performeurs refusent de participer au circuit dominant de la production, de l’accumulation, bref du fétichisme de l’objet d’art. Cela relève d’un engagement aussi bien politique qu’esthétique, car si la sphère de la marchandise s’entend comme une négation de la vie, alors la négation de la marchandise retrouve le sens même d’une résurgence de la vie – c’est-à-dire remet à l’endroit ce qui se trouvait inversé. L’action performative est donc une praxis hostile aux injonctions productivistes d’un marché visant l’accumulation du capital-art. Elle se comprend de ce fait comme une praxis cherchant à se désaliéner d’un art devenu prisonnier des formes totalitaires d’expression promues par le capitalisme achevé dont l’apparence relève du spectaculaire. La performance est donc, dans sa forme et dans son fond, négation du spectacle. Aussi, l’utilisation des images dans la performance n’a d’autre finalité que de renverser l’ordre dominant du spectaculaire pour y inscrire la vie dans ce qu’elle a de plus palpitant et d’effectivement présent.
Concernant le deuxième point, on est en droit de s’attendre, de la part de l’artiste, à un usage du détournement comme mode opératoire d’expression. Car si, comme l’affirme Debord : « le détournement est le langage fluide de l’anti-idéologie », alors, nous trouverons, dans le type de dispositif mis en oeuvre, des éléments exploitant ce procédé. Il semble bien que cela soit le cas puisque dès l’entrée en matière de cette performance nous sommes subitement confrontés à une succession d’images dont le caractère détournées apparait évident. A l’instar du film de Debord, il convient de comprendre cette technique du détournement comme l’énoncé d’une vérité qui advient dans sa présence même et non comme une vérité des images utilisées : « Le détournement n’a fondé sa cause sur rien d’extérieur à sa propre vérité comme critique présente. » Autrement dit, ce qui compte au premier chef, ce n’est pas la pertinence des images elles-mêmes mais la perspective artistique de leur détournement. Bien entendu, les images projetées ne sont ni anodines ni indifférentes, pas plus que l’ordre de leur succession dans le déroulement de la performance ou la violence sporadique de leur contenu. Le seul fait d’utiliser plusieurs scènes d’émeutes – s’étant déroulées sur les lieux mêmes (Göteborg) – fortement réprimées par les forces de l’ordre n’est certes pas sans signification. Pourtant, les images de la violence ne sont pas la violence réelle. Si l’on veut, ces images ne sont que la mise en œuvre édifiante de la violence spectaculaire qu’il s’agit au fond de critiquer. Car ce qui se passe, se passe toujours hic et nunc, ici et maintenant, alors que l’image, comme le notait déjà Platon, n’est qu’une copie mensongère, une simple idole (ειδωλον).

 

Afin de pouvoir se représenter un peu mieux le déroulement de cette performance, il convient d’éclaircir le dispositif performatif élaboré par l’artiste. Le public, plongé dans une pénombre faiblement éclairée par quelques sources lumineuses, fait face à un écran. A droite de celui-ci et à proximité du public, Edwige est assise à une table sur laquelle un ordinateur (source des images qui se déploient sur l’écran) est ouvert. Face à elle – c’est-à-dire à gauche de l’écran – se tient Peter Rosvik, debout, pour l’instant immobile, éclusant en silence des canettes de bière.

 

Après le générique de la Metro Goldwyn Mayer, la performance s’engage sur un cortège de clichés concernant l’Amérique. Ce défilé, d’abord lent, s’anime progressivement jusqu’à atteindre un paroxysme – tant dans la multiplication affolante des objets produits en série que dans le vertige d’une architecture de la démesure. Le ton est donné, l’image dupliquée à l’infini, l’image manipulée nerveusement et à la hâte, l’image reproduite jusqu’à l’écœurement, soulignée par une musique ad hoc, nous donne le vertige. Cependant, alors que ce flux emblématique défile, le visage d’Edwige s’incruste ex abrupto sur l’écran. Ce visage qui, sous les effets du logiciel Photo Booth, se morcelle au point de provoquer une impression de dédoublement, n’est pas sans susciter une inquiétante étrangeté. Quid de cette représentation du visage de l’artiste ? Le fait qu’Edwige projette simultanément son image dédoublée sur l’écran, occasionne en réalité un trouble sur ce que nous sommes à même de devoir regarder. Que voyons-nous en définitive : elle, dans sa présence effective devant nous ? Ou bien : elle, en tant qu’image illusoire, déformée – mais par là même fascinante ? Cette mise en abyme de soi par le truchement de ce jeu spéculaire jette d’emblée un discrédit sur l’incroyable fascination que peuvent produire les images, qui, par delà leur dimension mensongère se révèlent ici fondamentalement équivoques et suspectes.
Ce dispositif va se poursuivre tout au long d’une action de maquillage. En effet, nous assistons à la transformation progressive d’Edwige en « reine de la nuit ». Utilisant sa webcam comme un miroir, elle va, avec tout le soin nécessaire, grimer son visage avec les artefacts inhérents aux danseuses de cabaret : faux-cils, fards, rouge à lèvres, eyeliner, etc. Durant tout ce temps, Peter continue à boire tandis que les images se succèdent sur l’écran de façon ininterrompue. Cette modification graduelle du visage se prolonge par le troc des vêtements de ville pour un string noir accompagné d’un soutien-gorge assorti et de chaussures à talons hauts. Alors que la musique aux relents mystico-héroiques d’Enya s’impose, Edwige Mandrou s’empare d’un épilateur et s’arrache une partie des poils pubiens devant sa webcam, engendrant un effet kaléidoscopique aussi saugrenu qu’énigmatique sur l’écran. Enfin, la métamorphose atteint son comble lorsque la performeuse se pare du harnachement – composé de plumes d’autruche – spécifique à ces danseuses et se met, avec frénésie, à se trémousser de façon mi-cathartique mi-hypnotique.
La singularité d’un tel événement a de quoi surprendre, mais, si on garde en mémoire le fil conducteur initié par le propos, il est possible d’y déceler la dichotomie dénoncée par  Guy Debord : Alors que le spectaculaire hégémonique et hypnotique défile, l’être aliéné qui y participe et le nourrit de sa substance, en est évincé. Pour lui, seule la réalité prosaïque fait loi, le réel avec son ordre, sa temporalité, sa misère et sa banalité. Ces filles, grimées de leurs apparats, vouées corps et âme à la société du spectacle, évoquent manifestement notre propre aliénation. En ce sens, ces « donneuses de rêves » ne doivent pas être entendues dans leur littéralité mais comme métaphore de notre situation. A la solde d’un « tyran » que nous nourrissons et entretenons de notre labeur, nos « gesticulations » – aussi vaines que ridicules – figurent le pathétique de la situation. Certains « dansent » jusqu’à l’inconscience pour s’étourdir et ne pas sentir le poids de leurs propres chaînes. D’autres, à l’image de ce qu’illustre Peter Rosvik – apathique, hagard, bazardant méthodiquement les canettes de bière après s’en être abreuvé, se grisent d’images et d’alcool. Entre divertissement et abrutissement, le choix semble cornélien. « Le spectacle est le mauvais rêve de la société moderne enchaînée, qui n’exprime finalement que son désir de dormir. Le spectacle est le gardien de ce sommeil. »
Désormais, nous pouvons entendre l’intitulé de la performance : la politique de l’autruche. Après s’être fougueusement déhanchée sur des rythmes endiablés composés sur la base de percussions, Edwige sort d’un sac des modèles réduits de voitures et d’hélicoptères de police – jouets bruyants et virevoltants qu’elle remonte et dépose au sol.
Dans ce tintamarre assourdissant où retentissent les sirènes, Peter, enfin actif, l’aide à insérer sa tête dans un seau qui sera entièrement rempli de sable, devenant, par ce fait, un agent efficient de l’aveuglement. Seul un tuyau permet encore à Edwige de respirer. Toujours affublée de ses plumes d’autruche, l’artiste, penchée en avant, jambes écartées, nous impose, du coup, la vue de son postérieur. Par cette posture, mimant au pied de la lettre l’attitude supposée des autruches qui, face à un danger, enfouiraient leur tête dans le sable, elle rappelle notre tendance à masquer notre regard pour vainement tenter d’échapper à des situations difficiles mais bien réelles. Belle allusion ironique de ce qui se passe effectivement dans le monde car, si nous absorbons quantité pléthorique d’images, celles-ci font le plus souvent écran à l’existence réelle. Nous regardons, subjugués, et nous croyons voir. Or, ce que nous voyons n’est que l’ombre fantomatique de nos propres vies dépossédées de leur substance vitale.
Alors qu’elle a la tête dans le seau, Peter déambule au milieu du public en offrant, à qui le souhaite, des parts prédécoupées d’un large fromage sur lesquelles sont fichés de petits drapeaux nationaux. Les parts inégales furent au préalable établies en référence au rang de classement déterminé par le PIB de chacun des pays mentionnés. De fait, pendant que l’assistance se partage symboliquement le monde, sous les rugissements irritants des sirènes policières, Edwige Mandrou ne voit et n’entend rien, totalement absente à ce qui l’entoure. Il faudra attendre qu’elle retire, groggy,  sa tête du sable pour l’entendre énumérer les noms des pays les plus pauvres restant  » bizarrement  » sur le plateau, avant de les jeter à la poubelle, tels des miettes.
Ainsi s’achève cette performance mémorable qui a, à proprement parler, abasourdi un public médusé et pratiquement KO – ou pour le moins, sonné – au point de ne plus savoir s’il convenait d’applaudir ou de préserver le silence bienvenu résultant de l’arrêt des sirènes.

 

Constituant la dernière performance de la soirée, elle fut en tout point édifiante de ce que peut être la pratique de l’art-performance – entendu ici comme la négation active du spectaculaire par l’entremise d’une action modifiant authentiquement notre rapport à la réalité. Un tel événement n’a pas grand-chose à voir avec les formes classiques de dramatisation spectaculaire. Ce que nous vivons, à travers la performance, relève entièrement de l’expérience singulière de notre propre vie, dans une temporalité qui n’est pas de l’ordre de la captation ou du divertissement, mais bien de l’ordre du temps éprouvé, du temps vécu.  Si, comme le pense Debord, « le spectacle réunit le séparé, mais (qu’il) le réunit en tant que séparé », l’action performative sépare le « réuni » (le collectif) pour produire du « séparé » (de l’individuel). Ce n’est pas en tant que public que nous sommes convoqués, mais en tant qu’individu existant par un autre individu lui-même existant et non pas, comme c’est le cas dans les spectacles, par un personnage quelconque ou le représentant abstrait de quoi que ce soit ou de qui que ce soit. Si « la foule c’est le mensonge », alors, à l’instar de Diogène qui cherchait, muni d’une lanterne, un homme en plein jour, les performeurs nous interpellent invariablement en tant qu’homme et seulement en tant qu’homme. Cette lutte perpétuelle pour rester debout n’est pas neuve, mais il semble qu’aujourd’hui le monde de l’art-performance en soit le héraut salutaire. « Ce que le spectacle a pris à la réalité, il faut le lui reprendre. Les expropriateurs spectaculaires doivent être à leur tour expropriés. Le monde est déjà filmé. Il s’agit maintenant de le transformer. »
Jean-Luc Lupieri, Janvier 2009

 

AFIAC/Café/Performance Mehdi Georges Lahlou

Le 3 Décembre 2010 au café de Fiac 21h

 

Performance de Medhi-Georges Lahlou

Mehdi-George Lahlou est né aux Sables d’Olonne en 1983 et il est franco-marocain. Formé à l’Ecole Régionale des Beaux-Arts de Nantes (ERBAN), il obtient son diplôme en 2007 ; il est titulaire d’un master de l’Académie St Joost à Breda – et vit à Bruxelles. Il a exposé dans les galeries Transit (Belgique), Kunstraum  Richard Sorge (Allemagne) et DIX9 (France). Il sera présent à Art Brussels 2011 et Art Rotterdam avec la galerie Transit (Belgique).

EMILIE BOUVARD : Mehdi-Georges Lahlou

Mehdi-George Lahlou, perché sur ses talons aiguilles rouge vernis marche sur des oeufs, et au passage brise des c…, et effiloche quelques voiles et tapis. Performer, plus ou moins peintre, « installateur », vidéaste à coup sûr, il parvient à construire une démarche cohérente, chaloupant entre ces dangereux récifs que sont les poncifs sur le genre (sexuel), et la difficulté à élaborer un discours distancié sur l’islam comme identité. Comment perturber à nouveau le genre quand il semble que Judith Butler a tout dit, comment interroger le religieux quand le simple fait de représenter, et donc de recomposer et d’interpréter peut poser problème ? Comment toucher juste ? Irriter sans facilité ? Le travail de Mehdi-Georges est comme ses talons haut : visible et même voyant, accrochant le regard, il a aussi du style, un certain chic dans le ridicule, et tient la route.

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Traces | vidéo

AFIAC/Vidéos Thierry Boutonnier

AFIAC/Videos

présente

thierry-boutonnier-video-performance

Une performance réalisée au café de Fiac le 5 novembre 2010

 

AFIAC/Café/Performance Thierry Boutonnier

Le 5 Novembre 2010 au café de Fiac à 21h

AFIAC/Café/Performance Thierry Boutonnier

Thierry Boutonnier est un artiste actif et réactif déployant un panel de comportements individuels en réaction au système capitaliste : la désignation, l’analyse, l’illustration, le jeu, le combat, le mimétisme, la démission, la dérision.

– un professionnel, envisageant l’acte artistique avec les même exigences d’information, de savoir-faire, d’identification d’objectifs, de recherche opérationnelle, d’impératifs décisionnels et de concentration de moyens que n’importe quelle activité de project management.

– un non-spécialiste, qui, au sein d’une économie concurrentielle en constante mutation, se doit d’être polyvalent et pluridisciplinaire, utilisant tous les moyens à sa disposition : performances, vidéo, sculptures, photographies, dessins, publications, etc, un homme de foi, qui représente, surjoue, exagère, doute, échoue… tout en continuant d’y croire.

 

Stratégies & méthodes employées

Thierry Boutonnier lors de sa performance à Fiac

– Mimétisme critique (TB expérimente en actes les différents maillons de la chaîne économique: concept, maquette, business plan, financement, communication etc., mettant en lumière l’extraordinaire capacité de subordination de ces systèmes à tous les types d’entreprises, même les plus aberrantes).

– Veille intellectuelle (parallèlement, TB mène des recherches iconographiques et documentaires pour dégager les connotations sémantiques de ses axes de travail)

– Interventionnisme célébratif (TB met en scène ces liens symboliques – voir point précédent- via des pratiques participatives le plus souvent basées sur une transaction marchande et non pas sur la gratuité, contrairement à une certaines esthétiques de la libéralité).

– Sabotage (TB pratique un art de la guérilla, créant des perturbations légères en un territoire indéterminé et quasi-invisible au coeur même du système affronté. Son choix : ne pas détruire les choses mais les rendre inutilisables, irrécupérables).

– Mise en abyme (TB confronte le vivant à la réalité de son conditionnement létal par l’industrie: le chewing-gum à la chlorophylle et le bourgeon, la vache et les quotas laitiers, l’homme actifet les pompes funèbres, etc.)

– Canular (On n’en est jamais très loin)

 
Guillaume Désanges, Critique d’Art.

Relatif au travail

Thierry Boutonnier performance à Fiac

 

 
 
 

Aller au travail et témoigner malgré tout ou vendre des oeufs frais puis passer l’éponge ; manger du mouton qui mange, organiser des travaux révoltants avec des vers à soie ; faire une opération de télémarketing pour connaître la valeur de la vie ; être propriétaire et sot tel un épouvantail à moineaux et envoyer une formule de politesse juste ; rechercher des amis à tout prix et alors embaucher un gardien de sécurité et une hôtesse d’accueil pour voir;
Comme un représentant, expliquer les objectifs de production laitière aux vaches, la chaîne de transformation du porc aux cochons, ou le cours du blé au blé… Avant d’être représentant, tenter de monter une entreprise de sponsoring d’événements funéraires, mais comme entreprendre fatigue, la rêver alors, dans un sommeil qui dure le temps d’un vernissage. Ce rêve d’entreprendre, le projeter au Canada en faisant le mort dans un cercueil distributeur « Pepsi »…

Voilà un petit parcours d’actes en verbe qui raconte des histoires d’individus. Ils ne sont pas acteurs, ni spectateurs, ils sont davantage des gens qui rendent une sorte de service dans une certaine économie. Ils font image, c’est comme cela qu’ils communient. Ils représentent la sécurité, l’accueil, la culture, le devenir en chiffre, le devenir mort. Ils tentent de réaliser des rêves, les leurs ou ceux des autres. Ils sont à la limite des espaces, l’espace public ou l’espace privé, de l’humain et du non-humain, du vivant et du non-vivant, du conscient et de l’inconscient. Par ces actes, ils tentent la traversée de ces catégories.

Ils se confrontent à d’autres qui tirent profit de leurs croyances.

Dans ma recherche, il est davantage question de processus, de mimétisme de fonctionnement des micro-systèmes sociaux.

C’est-à-dire que je tente de mimer autant les signes que les manières dont ils fonctionnent dans les échanges.

Ainsi, le travail consiste à la fois en la production d’actions et en la gestion des traces qu’elles produisent. Les actions sont effectuées par des sujets (dont moi), comme vecteurs de l’action produite et de ses effets.

Les traces sont multiples. Elles n’ont pas l’unique fonction documentaire car elles sont gérées en parallèle avec les actions.

Les traces sont ensuite montées pour prolonger les actions aux travers des volontés d’autrui afin que ce travail soit, de fait, une pensée agissante au sein de systèmes sociaux ou provoque un sourire étrange.

T.B

 

Site internet : http://www.tb-rd.tb6380.com/

 

 
Traces | vidéo

AFIAC/Café/Performance | Helge Meyer

Le 16 octobre 2009, Fiac

AFIAC / Café / Performance Helge Meyer

 

Helge Meyer a fondé avec Marco Teubner en 1998 System HM2T, un duo de performeurs qui  s’est produit dans de nombreux festivals en Europe, en Asie, en Amérique du Sud, en Australie et aux États-Unis.
Helge Meyer donne des cours théoriques à l’Université de Hildesheim et à l’école secondaire de Ilsede, en Allemagne. Son travail de recherche explore les notions de douleur et de coopération, ainsi que l’histoire des images. En 2008, il est diplômé d’un doctorat en Science des Arts/Histoire de l’Art de l’Académie des Beaux Arts de Stuttgart, en Allemagne. Sa thèse, ayant pour sujet la représentation de la douleur dans la performance, a été publiée en 2008 (« Schmerz als Bild – Leiden und Selbstverletzung in der Performance Art).

Helge Meyer est né et vit à Woltwiesche, en Allemagne, en 1969.

Site internet : http://www.performance-art-research.de/

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Performance | Camille Renarhd | 17 Mai 2009

« Je ne pensais pas rencontrer un cactus qui danse »

La performance réalisée par Camille Renarhd en collaboration avec Mark Moti Zemelman à Fiac en mai 2009, sur la place du village, est en quelque sorte un rituel de passage entre les familles fiacoises ayant reçu des artistes en résidence en 2008 et celles qui furent les hôtes en 2009.

Camille Renarhd et Mark Moti Zémelman ont organisé un stage de contact improvisation : Cet atelier c’est construit en dessinant un corps :Un « corps-instrument». Les stagiaires ont également participé à la performance. Il s’agit de : Florence Fauré, Guislaine Dumanoir, Anica Mignotte, Dominique Causse, Rosemarie Hoffmann.

Suite à cet événement, Camille Renarhd à écrit :

La première image me vient au Guatemala. Je suis allongée sur le sol et un arbre respire à travers mon ventre. Les racines-corps-terre. Il faut une attention particulière pour que la motte de terre, pleine de racines, ne se renverse pas. Je la respire en équilibre sur mon ventre.

Deux mois plus tard, je suis à Fiac. Je repasse sur des terres connues. Et cette fois il s’agit de laisser la place, faire de l’espace, détruire même des traces pour que d’autres artistes habitent ces lieux, cette place, ce village.

Un rituel de passage // « Je ne pensais pas rencontrer un cactus qui danse. »

J’arrive tôt le matin sur la place du village. Je marche en faisant des cercles. Ce n’est que comme cela que j’arrive à écouter. Il me faut marcher, marcher, marcher, compter le nombre de mes pas et m’arrêter précisément à 70, alors seulement les visions surgissent.

L’image de la femme-matrice réapparaît. Nous serons 6 femmes-arbres.

Et deux semeurs-poudreurs.

Je ne pense pas tout de suite aux peintures rupestres.

C’est Pascal P. qui les voit. C’est tellement évident.

Je pense beaucoup à Christine Quoiraud et à Min Tanaka.

Je vois des corps qui cherchent à s’arracher de leur matrice de glaise / pour que des enfants-végétaux naissent / et qu’une transformation advienne. C’est un cycle. À un moment, il faut même tout laisser, ne rien garder avec soi, repartir, poudré et à moitié nu.

Surtout, il y a l’incroyable capacité des êtres à se saisir d’une image, à la sculpter, à la déplacer, à y mettre du souffle : Moti-Dominique-Rosi-Anika-Florence-Ghislaine-Oriane.

Qui sommes-nous pour oser traverser ainsi / d’un trait / / nous étions deux / nous étions trois / nous étions six /

Je n’aurais plus peur d’être une source / ventre des femmes /

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