AFIAC/Café/Perfomance | Tsuneko Taniuchi

AFIAC/Café/Performance | Tsuneko Taniuchi

Commissariat Patrick Tarres

Cet AFIAC/Café/performance ouvre un nouveau cycle pour l’AFIAC qui disposera à compter de juin d’un nouveau lieu de résidence, d’exposition, de rencontre et de convivialité autour de l’art, partagé avec le PopUp Café culture, 6 place du Four à Fiac.

RDV dès 18h30 ce jour-là pour le vernissage de l’exposition « A la frontière du récit »,  en amont de la performance de Tsuneko Taniuchi.

Tsuneko Taniuchi «Micro-événement n°45 /Six personnages de femmes + Une femme / Sept jours » Ginza Maison Hermès Le Forum, Tokyo, 2014 – Tsuneko Taniuchi © Adagp, Paris 2017 / Photos: Atsushi Nakamichi / Nacasa & Partners Inc.

Tsuneko Taniuchi est née à Hyogô, Japon. Elle vit et travaille à Paris depuis 1987.

En 1995, elle créé le concept « Micro-événement ». Cette formule artistique, mise au point par l’artiste, repense les relations entre le spectateur, l’œuvre et l’artiste.

«Le micro-événement est une sorte de plateforme marquée par la volonté d’être au même niveau que le public. Je sollicite son engagement en le conviant à participer à une expérience. Il s’agit de construire des évènements au niveau individuel, des actions ciblées. La notion de «micro» c’est par opposition à «macro». Les micro-événements questionnent toujours la limite entre la réalité et l’art. Il s’agit donc de bousculer le réel, les traditions, les représentations, détourner les codes.» (Tsuneko Taniuchi)

L’œuvre de Tsuneko Taniuchi aborde principalement la question des limites, celles entre l’art et la réalité, mais aussi celles qui traversent la multiplicité des identités, qu’elles soient sexuelles, sociales ou culturelles.
Le travail de Tsuneko Taniuchi a été largement exposé dans le monde notamment en Europe, aux Etats-Unis et au Japon. Elle est également intervenue lors de manifestations internationales. (la Force de l’art au Grand Palais, Paris en 2009 et 2006, la Biennale Liverpool, Liverpool, 2004.)

plus sur Tsuneko Taniuchi

Exposition | À la frontière du récit

À la frontière du récit | un ensemble d’œuvres issues de la collection des Abattoirs-FRAC Occitanie

Commissariat Patrick Tarres
En partenariat avec les Abattoirs-FRAC Occitanie

Vernissage 2 juin 2017- 18h30
Exposition 02.06.2017 > 18.10.2017

Cette exposition inaugure l’ouverture du nouveau lieu de L’AFIAC et du POP UP Café. Elle s’inscrit en préambule à Frontières effrangées qui sera le titre du festival d’art contemporain des artistes chez l’habitant programmé du 8 au 10 septembre 2017 à Fiac.
frontières

Becky BEASLEY Portsmouth (Royaume-|Uni), 1975
If I should see a white bear (North-west passage, AUX II) 2013
Photographie noir et blanc, encre pigmentaire sur papier

L’artiste britannique Becky Beasley explore les relations entre photographie et objets, le corps et l’intériorité, d’une manière extrêmement personnelle quoique développée grâce à l’immersion dans les pensées et méthodes d’autres artistes et écrivains. Selon ses propres mots, sa pratique s’intéresse aux questions photographiques dans la sculpture et aux questions sculpturales dans la photographie.
If I Should See A White Bear (North-West Passage, AUX II) – Si je voyais un ours blanc (passage Nord-Ouest, AUX II) fait partie d’une série dont le point de départ est une nappe appartenant à la mère de l’artiste, référence à la vie de famille, aux repas partagés et à la nourriture. Le trou a été percé de manière à pouvoir y glisser un parasol au milieu, sur une table de pique-nique, mais dans le contexte de l’histoire et de la théorie de la photographie, il évoque irrémédiablement l’influent texte de Roland Barthes sur le punctum, ou « petit trou »: Barthes expose dans La Chambre claire: Notes sur la photographie, qu’il constitue la source du caractère poignant de la photographie. Dans cet ouvrage rédigé après la découverte d’une photographie de sa défunte mère, de laquelle il se sentait proche, il écrit: « le punctum d’une photographie est cet accident [d’un détail photographique] qui me saisit (mais qui également m’anéantit, se révèle poignant à mes yeux),… car le punctum est également: dard, grain, coupure, petit trou—-et aussi le point noir sur un dé.» Dans la photographie de Beasley – également un portrait maternel d’une certaine façon – ce qui pourrait se révéler douloureux dérive de l’acte d’amour d’une mère qui cherche à protéger sa famille de la chaleur du soleil. En opposition à l’argument qui voudrait que la photographie soit toujours douloureuse puisqu’elle nous confronte à ce qui est perdu et envolé, Beasley adopte une approche optimiste et statue que l’art photographique déborde de vie et d’amour.

Elle propose avec élégance et douceur l’inscription de toute vie et expérience de vie dans la photographie et décrit cet effort comme un geste absurde mais politique et spirituel: un acte fondamentalement libératoire.
L’œuvre évoque également d’autres thèmes parcourant la pratique de l’artiste. Beasley a mis en valeur la similitude de la nappe avec des draps et vêtements cléricaux, ainsi que le caractère sexuel d’un possible trou pour voyeur. Le fantôme des premières heures de la photographie, lorsqu’un tissu recouvrait la caméra, laissant juste un trou pour la lentille, plane au-dessus de ces connotations domestiques et sexuelles. L’œuvre, minimale et opaque en apparence, constitue une sorte d’acte de résistance, ou un plaidoyer pour l’intériorité qui sous-tend ces multiples références.

La question de l’échelle permet à Beasley d’explorer les aspects sculpturaux de l’image qu’elle produit. Ici la nappe est reproduite à l’échelle 1, testant les limites du processus photographique. Sa majorité possède une précision et une haute définition qui révèle dans le détail les creux et plis du tissu, mais aux extrémités, l’image s’adoucit. Le cadre est également de la plus haute importance: la photographie est plus “relâchée” sur les côtés, comme pour démontrer qu’il s’agit là d’un objet appartenant au monde et non un procédé purement pictural et sans âme.

Le titre, If I Should See a White Bear (North-west Passage, AUX II) -Si je voyais un ours blanc (passage Nord-Ouest, AUX II), est tiré d’un fameux passage du roman de Laurence Sterne, The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman (Vie et opinions de Tristram Shandy, gentilhomme), écrit au XVIIIème siècle. Le passage en question examine les contingences du langage et de la narration en énumérant de manière laborieuse et comique les différentes manières de nommer un ours blanc. Par conséquent, le titre ne vise pas à nommer ou circonscrire mais bien plutôt à envisager les multiples possibilités du langage pour désigner un objet.
Helen LEGG 2013 [trad. Laurent Garcia]

 

François BÉALU, Amilly (Loiret), 1932
Le Roi des Aulnes 1980
Techniques mixtes

François Béalu se forme à l’art de la gravure lors des deux années qu’il passe en Suède. A son retour en France au début des années 1960, il ouvre une librairie, « La Mandragore », spécialisée dans la littérature fantastique et grave sa première plaque en 1963. Au cours des années qui suivent, l’artiste enrichit sa pratique, variant les techniques et les supports autour de représentations imaginaires. Près de dix ans après l’ouverture de sa boutique, il décide de quitter le commerce du livre et Paris pour s’installer en Bretagne dans les Côtes d’Armor où il se consacre exclusivement à la gravure. Dans les années 1980, il visite Amsterdam où il fait la découverte de l’œuvre gravée d’Hercule Seghers (1590-1638) et de Rembrandt. Plus tard, au début des années 1990, il se rend au Maroc et en Tunisie où il trouve dans le désert une nouvelle source d’inspiration. A cette période, il fait la rencontre de Gilles Clément, ingénieur paysagiste, avec qui il se lance dans le projet d’un livre d’artiste. De cette collaboration naît une amitié entre les deux hommes qui partagent une réflexion commune sur le paysage, ainsi qu’un ouvrage «L’éloge de la friche» qui paraît quelques années plus tard. Au fil du temps, la pratique de François Béalu ne cesse d‘évoluer, diversifiant les thèmes et les techniques, dont témoigneront plusieurs expositions dans les musées français.

L’œuvre gravée de François Béalu s’appuie sur le dessin. A ses débuts, l’artiste explore des thèmes fantastiques, oniriques, issus de ses nombreuses lectures. Son installation en Bretagne en 1971 marque un tournant dans sa pratique ; il délaisse le monde de l’imaginaire et se plonge dans un travail descriptif. Les heures passées dans son jardin lui font découvrir un monde organique, souterrain, fait de bulbes, de larves, de racines, lui inspirant de nouvelles compositions. Le corps fait peu à peu son apparition dans son œuvre, mêlé à cet univers minéral et végétal. Dans les années 1980, lors de ses déambulations dans la campagne bretonne, il découvre les mégalithes.

Ses rochers archaïques immenses deviennent pour l’artiste une véritable source d’inspiration, son regard quitte les profondeurs de la terre pour s’élever vers le paysage. Ce dernier devient ainsi dans les années suivantes le sujet de prédilection de Béalu, travaillant herbe, vent, pierre, relief dans un rapport intime à l’espace et au temps. En constante évolution, son œuvre se peuple petit à petit d’éléments géométriques, de signes graphiques associés aux formes végétales dans un travail proche de l’écriture. Ses gravures deviennent plus abstraites, la ligne s’émancipe du sujet, interrogeant notamment la notion d’infini. Dans les années 2000, le corps fait son retour dans la pratique de l’artiste. Etudié dans son anatomie, proche de l’écorché, il se mêle aux recherches menées sur le paysage au sein de compositions où les deux sujets finissent par se confondre.

Le roi des Aulnes (1980) témoigne de l’amorce du travail de l’artiste sur les mégalithes bretons. Ici, la composition est entièrement occupée par cette masse rocheuse à l’allure sculpturale. Imposante, la roche paraît cependant tendre, comme modelée à la manière d’un corps dans une texture semblable à celle d’une peau. Fissurée, éclatée à certains endroits, elle porte à sa surface les traces du temps à la manière d’un épiderme ridé, tacheté. La matière apparaît ici comme une combinaison de la chair et du minéral, rendue dans un trait fourmillant et un contraste des noirs et des blancs qui lui confère toute sa texture. Le titre de l’œuvre est tiré du roman de Michel Tournier, « Le roi des Aulnes » paru en 1970. L’auteur, à travers le récit de la vie du personnage d’Abel Tiffauge, revisite le mythe de l’ogre dans le contexte de la seconde guerre mondiale. C’est peut-être ce que l’artiste nous donne à voir à travers cette matière étrange, la peau d’un ogre tapi dans les rochers. L’hybridation du corps et de la pierre en est ici à ses débuts, s’exprimant de façon plus explicite dans les compositions des années suivantes.

 

Francesco BONAMI, Florence (Italie), 1955
Indian files o il sogno di Scipione 1985
Huile sur toile

Francesco Bonami est connu pour ses écrits critiques en matière d’art contemporain et son travail en tant que commissaire d’exposition. Né à Florence en 1955, il étudie la scénographie et l’histoire de l’art à l’Académie des beaux-arts. Au début des années 1990, il s’installe à New-York où il collabore avec le magazine Art Flash pour lequel il produit plusieurs articles. En 1993, il devient commissaire d’exposition pour la section Aperto à la Biennale de Venise, une sous-exposition consacrée aux jeunes figures de l’art contemporain. Il y présente notamment Maurizio Cattelan et Damian Hirst, encore méconnus. Très vite, Bonami s’impose et assure la mise en œuvre de diverses expositions ; dès 1999, il devient conservateur au Museum of Contemporary Art de Chicago. Véritable tremplin, cette nomination l’amène à se voir confier en 2003 l’organisation de la 50ème Biennale de Venise. Disposant d’une renommée internationale, Bonami est également l’auteur de divers ouvrages dont « Cattelan, Maurizio- L’autobiographie non autorisée » paru en 2013.

La carrière d’artiste de Francesco Bonami fut relativement brève. Dès 1988 il abandonne la peinture pour une activité plus institutionnelle. « Je me compare souvent à un géographe en train de dessiner une carte. Mais les points, les lignes qu’il trace dans l’espace ne sont pas la réalité. Ce qui se crée en fait, est une histoire du paysage. Faire une peinture est une aventure en territoire inconnu. J’appelle le temps, j’essaie de le capter. J’essaie de rappeler en fait la même harmonie que lorsque j’étais enfant. »

Indian Files o il sogno di Scipione (1985), est une huile sur toile traitant le thème mythique du songe de Scipion mis en scène par Cicéron dans le dernier livre de son traité politique « De Republica ». Scipion Emilien y raconte un rêve fait une vingtaine d’années auparavant alors qu’il était en Afrique au début de la troisième guerre punique. Au cours d’une soirée passée en compagnie du roi de Numibie Massinissa, il s’endort et se met à rêver. Il se voit accueilli dans les cieux par ses pères, Scipion l’Africain et Paul Emile, qui lui présentent l’organisation cosmique de l’univers et lui révèlent les conditions de l’immortalité de l’âme. Les héros dévoués ayant agi conformément au bien se verront attribuer une félicité éternelle. L’histoire est interprétée ici par l’artiste qui figure le corps du personnage de Scipion étendu, endormi, au milieu d’un paysage nuageux où défilent, les uns derrière les autres, de petits hommes vêtus de rouge. A l’horizon, un paysage se dessine, semblable à celui d’une ville au bord de l’eau, comme un rappel à la réalité nuançant le panorama onirique au premier plan. Les figures en file indienne, la tête baissée, les yeux clos, tenant à la main leurs chapeaux, évoquent le deuil, la veillée du défunt gisant sur son lit mortuaire. Une dimension mystique et poétique se dégage de cette vision nuancée par le rapport à la mort.

 

Virginie BARRÉ Quimper (Finistère), 1970
Time after time 2006
Grand mannequin en résine polyester et résine de coulée epoxy, peaux de cheval sur la tête, peaux de mouton au sol, tissu, couverture en feutre, couverture militaire, petit mannequin en résine.

Les œuvres de Virginie Barré ne racontent pas d’histoires, elles les contiennent. Et, à la lisière du rêve et de la réalité, ses personnages semblent avoir développé des facultés à sonder des mondes parallèles inconnus.

Une figure géante d’indienne assise en tailleur, les yeux clos, semble contempler sa propre effigie, elle aussi les yeux fermés. Comme un symbole de l’auto-réflexion, Time after Time évoque à la fois l’univers médiumnique et les espaces ambigus du refoulé et de l’imaginaire.
Cette proposition a été librement inspirée par la vie et l’histoire de Hilma af Klint (1862-1944), une artiste suédoise, pionnière de l’art abstrait. Née le 26 octobre 1862 à Stockholm, Hilma est issue d’une famille noble. Élève à l’Académie royale des Beaux-Arts de Stockholm, elle se consacre d´abord, comme toutes femmes peintres de cette époque, à la réalisation de paysages et de portraits, disciplines qu´elle a pratiquées professionnellement une grande partie de sa vie.

Parallèlement à ce travail, elle fonde en 1896, avec quatre autres femmes, le “Cercle des cinq”, et pense entrer en contact, par le biais d’expériences médiumniques, avec des esprits qui deviendront à la fois ses “Guides” et les commanditaires de ses premières toiles abstraites. Dans les années 1910, elle étudie l’anthroposophie, une discipline qui se veut une science de l’esprit, une tentative d’étudier, d’éprouver et de décrire des phénomènes spirituels avec la même précision que celle avec laquelle la science étudie et décrit le monde physique.

Virginie Barré, née en 1970, escalade les genres et les époques et se livre à des emprunts tous azimuts à la fois dans les coffres de l’histoire de l’art et dans ceux de la culture populaire. Les indiens Hopi chevauchent des fauteuils de Mies van der Rohe, les suffragettes côtoient les blondes platines d’Hitchcock dans des mises en scène arrêtées, des instantanées de récits non-élucidés.

« Son travail se lit par extraits, fragments, comme une énigme qu’on ne peut résoudre que si l’on suit les traces et les indices réunis dans ses images. On pourrait assimiler sa démarche à un processus de réanimation ou de re-création de l’imaginaire puisqu’elle réveille des personnages inanimés pour leur donner un nouveau souffle sculptural. Elle met et remet en scène et provoque le spectateur avec des installations plus vraies que nature, avec l’illusion de la posture et des jeux d’échelle.»
Jérôme Sans, 2009

 

Oliver BEER Pembury (Royaume-Uni), 1985
Alice falling de la série Reanimation 2014
Film 16 mm et transfert numérique couleur muet
durée: 2’17 »
Production : Villa Arson, Nice

Film d’animation reposant sur une citation d’un dessin animé de Walt Disney. Oliver Beer en a extrait les images pour les livrer à la réinterprétation d’enfants de la région niçoise. Une fois remonté, le film livre de façon subliminale et kaléidoscopique la narration traditionnelle du film augmenté de cette complexe perception infantile.

Oliver Beer est né en 1985 dans le Kent (Royaume-Uni), il vit et travaille entre Paris et Londres. Ayant tout d’abord étudié à l’Academy of Contemporary Music à Londres, puis à la Ruskin School of Fine Arts de l’Université d’Oxford, l’artiste développe un travail dont le corps et la voix sont les outils privilégiés. Artiste pluridisciplinaire, Oliver Beer réalise dessins, photographies, vidéos et performances. En 2009, il gagne le prix « New Sensations » de la Saatchi Gallery. En 2011, il est artiste résident au Pavillon du Palais de Tokyo et en 2012 aux cristalleries Saint-Louis dans le cadre du programme de résidence de la Fondation d’entreprise Hermès.

 

 

Le Pop Up Café

Ce nouveau lieu est pensé pour vous accueillir dans une ambiance festive et conviviale autour de propositions artistiques exigeantes et variées dont vous ne tarderez pas à connaitre les contenus en suivant l’actualité de ce site. L’AFIAC ne change pas d’ADN, nous restons une association active et nomade sur notre territoire et ce jusque chez vous si vous le souhaitez. La différence, c’est que ce double lieu vous permettra de rester en contact avec l’art contemporain et l’équipe de L’AFIAC tout au long de l’année.

Programmation de la soirée d’inauguration

18h30 vernissage de l’exposition « A la frontière du récit »
19h AFIAC/Café/Performance avec Tsuneko Taniuchi
Plus tard en soirée Set musical de Selecta BIG TALOU

Assiette de charcuterie/fromage servie par Le Pop Up Café culture en cas creux.

Delphine Balley | Plastic Queer

Delphine Balley

Fiac 2015 – Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

L’artiste était reçue chez Marianne Saïd et sa fille

 

Le mariage des oiseaux, Fiac, 2015

Installation : photographies, oiseaux vivants, cendres et plumes

Faire la fille, 2015

130 × 110 cm
Tirage jet d’encre sur papier Fine art d’après plan film, réalisé par Gil Collot (Picto Lyon), contre collage sur dibon

Faire le garçon, 2015

130 × 110 cm
Tirage jet d’encre sur papier Fine art d’après plan film, réalisé par Gil Collot (Picto Lyon), contre collage sur dibon

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Très vite, une correspondance d’images et de textes s’est instaurée avec Delphine Balley. Nous nous sommes abreuvées de pensées, les oeuvres se sont dévoilées. Ce sentiment de rare partage a scellé l’exposition. Avec ses huis clos photographiques, voire cinématographiques, l’artiste bouscule la bienséance de l’ordre des choses. Elle touche à l’intime comme une épine pique le bout du doigt… Finement, précisément.

Pénétrant dans une maison oubliée, un couple d’oiseaux bat de l’aile, effrayé par des visiteurs-voyeurs. Le décor s’inverse, les identités se troublent. L’oeuvre de Delphine révèle des us et coutumes ancestraux où l’inversion des sexes sillonne les croyances populaires.

Le mariage des oiseaux dévoile des jeux métaphoriques où les allégories du genre traduisent le secret des sexes. Faire le garçon, faire la fille démasquent un manège social où des photographies d’adolescents exhortent des rites de réversibilité des genres.

L’élan de l’adolescence souffle comme une braise à demi éteinte.
Un moment de vie creusé telles des initiales sur un tronc d’arbre.

Faire le garçon
Faire la fille

Les mots résonnent comme un jeté de sorts, une sorcellerie enfouie en nous. L’éveil des explorations plonge ces jeunes corps dans une nébuleuse contrée où les univers façonnés par l’adulte se confrontent aux juvéniles réalités.

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« Vivre, c’est sans cesse se
désagréger puis se reconstituer,
changer de forme, mourir et
renaître… »
Arnold Van Gennep, Les rites de passage, édition Picard, 1992

Véritable passage initiatique où les repères, les transformations et les mutations entrent en danse. S’ouvre alors une nouvelle voie portée par l’exaltation de ce qui nous entoure :
Un monde où le naturel et le social s’entrechoquent.

Des contrées aux âges lointains, les rites et coutumes accompagnent cette réalité. Boucliers contre les peurs, ils favorisent les chemins de la vie. Grimages, travestissements, transpositions sociales et animales rapprochent les corps, les séparent pour mieux les unir.

Entre jeux métaphoriques et pratiques magiques, ces allégories du genre traduisent le secret des sexes.

Dans certains pays, l’oblation de la chevelure (partielle ou totale) se pratique à l’occasion d’un passage d’âge, mariage pour les filles, puberté pour les garçons, en l’honneur des divinités…

Siffler, grimper, sauter, capturer, apprivoiser, ruser, manier le canif, tailler des sifflets, monter aux arbres… Derrière la quête des oiseaux se cache une inaccessible recherche d’une formation de la virilité masculine. Seuls les garçons y accèdent. Une fille qui siffle est un malheur dans la maison.

Or, il existe depuis toujours un berceau de la réversibilité où le bien nommé ordre des choses chavire dans l’indifférenciation sexuelle, où la valeur du sacré tournoie.

C’est ici que l’entre nous se profile, dans ces murs, pour inverser les horizons de la voie des oiseaux et le son des coutumes.

Karine Mathieu

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Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley


Red Bind | Plastic Queer

Red Bind

Fiac 2015 – Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

Le collectif Red Bind était reçu chez Céline San-Martin

 

Homochromies

Installation in situ

Technique : Bande sonore, 18’36’’ stéréo, France, 2015
Système sonore (amplificateur + 8 baffles stéréo + câblage)
Vidéoprojecteur, 2 ordinateurs portables
2 spots halogènes 300 W à lames

Photographies :
Homochromies #1 : Window
Photographie numérique, 2015
Impression sur bannière en PVC
300 × 200 cm
Homochromies #2 : Tobacco
Photographie numérique, 2015
Projection vidéo sur mur blanc
300 × 200 cm
Homochromies #3 : Figs
Photographies numériques, 2015
Diaporama, 50 × 30 cm
Homochromies #4 : Car
Photographie numérique, 2015
Impression sur bannière en PVC
rétroéclairée, 300 × 200 cm
Homochromies #5 : Senegal
Photographie numérique, 2015
Impression sur bannière en PVC
rétroéclairée, 148 × 183 cm

Performance, 20 sept. 2015, 25’

Documentation vidéo, 4’42’’
Couleur, stéréo, France, 2015, 16:9, HD,

Photographies : Red Bind – Gilivanka
Kedzior & Barbara Friedman avec
Céline San-Martin

Performance : Red Bind – Gilivanka Kedzior
& Barbara Friedman

Caméra & montage : Barbara Friedman
Documentation photo : Alexandra Laval,
David Michael Clarke, Barbara Friedman

Homochromie (féminin) :
Éthymologie : du grec homos, “semblable” †le†même”, et de khrôma, “couleur”.
1. (Zoologie) Caractéristique d’un animal à ressembler à son milieu par sa couleur.

 

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Avec Gilivanka Kedzior & Barbara Friedman, la puissance du travail s’est portée dans le faire de l’intime.
De délicats instants arrimés à jamais ont marqué au fer rouge nos secrètes exigences. Dans une dualité, ces artistes se fondent en une même peau renversant le statut d’identité. Elles bouleversent les carcans sociaux en flirtant avec les limites et les ambiguïtés d’un corps à corps. Pour la première fois, elles se confrontent à un nouveau genre, celui de l’exposition. Accoutumées des performances, elles s’immergent au sein de l’intime pour faire jaillir la part discrète de leur hôte. Un ménage à trois se tisse, les identités s’effeuillent peu à peu dans un album de famille. Entre photographies et archives sonores, l’univers de la maison devient le théâtre d’une intrigue où l’étrange et l’ordinaire se côtoient dans une déconcertante familiarité. Un certain voyeurisme transpire des pores architecturaux de la maison… Car c’est bien cela dont il s’agit,
VOIR CE QUI NOUS EST AUTRE… Ne pas s’enfermer dans une prison identitaire.

Karine Mathieu

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Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley


Romuald Dumas-Jandolo | Plastic Queer

Romuald Dumas-Jandolo

Fiac 2015 – Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

L’artiste était reçu chez Dorine Nogues, Christophe Larroque et leurs enfants

 

Avant que l’ombre ne passe

Installation in situ
Tissus à sequins, paille, bois, vidéo

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Enfant de la balle, Romuald Dumas-Jandolo a passé ses premières années de jeunesse sur les pistes du cirque ambulant de son père où il était contorsionniste. C’est cette histoire personnelle que l’artiste met régulièrement en scène, centrant son propos sur un monde de l’enfance qu’il imagine fantasmatique et sur la représentation d’un corps hors normes, qu’il travestit et transforme, pour rendre ainsi compte de la diversité des genres.
Le travail de Romuald Dumas-Jandolo est polymorphe. Il est constitué de dessins, d’installations, de vidéos “auto-filmées”, de sculptures, de comédies, de chants et de performances inspirés de la culture populaire, du monde du cirque en particulier, qui confère à sa pratique une dimension quasi autobiographique. L’artiste, qui fait coïncider les antagonismes du féminin et du masculin, de l’enfance et de la mort, de la culture populaire et savante, du tragique et du comique, opère par coutures et collages de matériaux précieux et communs, tels les perles et paillettes, les bijoux, plumes et tissus, les artifices de maquillage qui évoquent homme et femme à la fois. Acteur, voyeur et spectateur de lui-même, Romuald Dumas-Jandolo met régulièrement son propre corps à l’épreuve dans des situations souvent angoissantes de claustration et de contorsion, qui n’évacuent pas pour autant une certaine esthétique “glam rock”.

C’est donc un univers riche et complexe, sombre, burlesque et baroque à la fois que déploie Romuald Dumas-Jandolo et qu’il fait découvrir à la famille Nogues-Larroque, chez qui il a puisé son inspiration.

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Dans l’étendue qui figure le jardin de leur maison, se trouve une toute petite cabane qui abrite les jeux et les rêves des deux petites filles de la famille, Lùna et Anouk. Des rêveries auxquelles les enfants donnent corps avec toute la puissance de leur imaginaire et que l’artiste va revisiter à travers la dialectique de l’humour et de l’effroi. Customisée avec de la paille qui recouvre son toit, la cabane de Romuald Dumas-Jandolo ressemble à celles des contes de fées. Pourtant un monstre semble l’habiter. À travers la fenêtre de la maisonnette, le spectateur aperçoit en effet, dès l’extérieur, un géant qui s’agite et chante avec sa voix de castrat un hommage au timbre médiéval de Klaus Nomi.
Il s’agit d’une projection de la vidéo Baptême, que l’artiste propose de découvrir en poussant la porte de la petite habitation. On y voit alors un Romuald Dumas-Jandolo performer un étrange jeu de gesticulations. Le visage barbouillé de rouge à lèvres, l’artiste est filmé en plan fixe, nu et recouvert de mousse, dans une baignoire sabot trop petite pour son corps. En transe, il exécute jusqu’à l’épuisement différentes figures de contorsion dont le potentiel de
dangerosité nous semble soudain évident. Défiant en effet les lois de la gravité, tête en bas pieds en l’air, le corps recourbé à peine reposé sur la faïence glissante, une chute pourrait bien lui être fatale. Avec cette vidéo, Romuald Dumas-Jandolo met à l’épreuve ses propres limites physiques et psychiques et interroge les rôles traditionnels du masculin et du féminin.
À l’extérieur, entourant la cabane, une dizaine de membres du Ku Klux Klan grandeur nature accueillent les visiteurs. Immobiles, fichés sur des meules de foin, ils sont vêtus de leurs traditionnels costumes toutefois agrémentés de paillettes rose et or. Un comble, les membres du Ku Klux Klan seraient devenus fans de disco ??!! Pour l’artiste, ces figures inquiétantes, mais drôles également, évoquent une sorte de “Gloria Gaynorisation” du Klan et sont une manière ironique de critiquer une des plus tragiques périodes de l’histoire américaine à travers l’icône gay de la pop music US. Mais le plus étonnant ici est que cette caricature de la cruauté anticipe et dénonce l’hypocrisie de la société actuelle, qui voit aujourd’hui l’avènement d’un président américain élu en partie sur les voix des suprémacistes blancs. Or, tel est le pouvoir des artistes, comprendre le monde actuel et pressentir celui de demain.

Magali Gentet


Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley


Pascal Lièvre | Plastic Queer

Pascal Lièvre

Fiac 2015 – Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

L’artiste était reçu chez Alain et Jean Sudre Bech

 

Performance Place Monique Wittig

Plaque féministe Monique Wittig
Tirage photographique numérique sur aluminium de couleur blanche & mauve.

 

Maison féministe

Vidéo : Rêver l’obscur, 2015
Affiches, tissu mauve, T-shirts féministes pailletés, dessous féministes (sous-vêtements brodés)
Karaokés féministes (DVD)
Paillettes mauves posées sur tirage photographique numérique sur papier de couleur mauve
Porte-livres féministes (porte-bouteilles et livres féministes)

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La maison féministe

Il n’est pas habituel de tracer, dans une notice d’oeuvre, la biographie d’un artiste. Mais puisque nous traitons ici d’un sujet qui touche à l’intimité (celle d’une famille, d’un artiste et
d’un mouvement artistique) pourquoi ne pas se lancer ? Pascal Lièvre a donc un parcours atypique. D’abord comptable, puis astrologue, il se lance assez tardivement en art, au début des années 2000. Pascal Lièvre est un homme charmant, un dandy élégant, bienveillant et
généreux. Lorsque je l’ai invité à participer à Plastic Queer il ne faisait aucun doute pour moi qu’il saurait capter l’esprit et la particularité du projet de l’Afiac. Il a d’ailleurs été un des plus rapides à me répondre et un des plus enjoués par la perspective de partager sa réflexion autour du queer avec un public vivant en milieu rural.
Pascal Lièvre est le tenant d’une oeuvre prolifique qui se déploie entre vidéos, peintures, dessins, installations et performances relevant de la culture populaire, de l’histoire de l’art,
des engagements politiques et des questionnements philosophiques.
L’artiste place le corps, souvent le sien, au coeur de son projet et selon Julie Crenn l’utilise comme le « vecteur critique de la manipulation des images dans l’imaginaire collectif ». Concrètement cela donne, par exemple, une série de vidéos hilarantes où l’on observe Pascal Lièvre chanter des discours philosophiques sur des airs de chansons de variétés ou encore donner des cours de philosophie sous forme de défilés de mode où de jeunes hommes et femmes vêtus ou non défilent sur un catwalk en brandissant des pancartes scandant des textes philosophiques relatifs au corps et à sa représentation. Bref, Pascal Lièvre joue avec les codes, hybride les genres, manipule les registres de lecture, souvent avec humour et toujours avec savoirs.

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Pour Plastic Queer l’artiste a proposé une sorte d’oeuvre d’art totale, investissant la quasi-totalité de la maison de ses hôtes et multipliant les médiums et les points de vue. Jusque-là submergée par les souvenirs d’une vie passée, la maison, après le passage de Pascal, n’a conservé de son histoire que l’essentiel des meubles pour accueillir un projet dédié aux grandes figures du féminisme international.
Portant haut la couleur mauve chère à ces dernières dont l’artiste garnit chaque meuble et objet, cette maison féministe accueillait le public autour d’un échange convivial sur les grandes questions liées au genre et à la condition féminine à travers les écrits et théories de Judith Butler, Angela Davis, Simone de Beauvoir, Monique Wittig et tant d’autres. Livres, photos, textes étaient ainsi laissés à la disposition du public, tandis que dans une des salles de la maison une vidéo intitulée « Féminismes » nous laissait voir l’artiste tracer les noms de théoriciennes et militantes sur un écran de paillettes noires. Chaque nom recouvrant le précédent comme pour signifier l’oubli et sans doute le désintérêt dans lesquels sont aujourd’hui encore laissés ces concepts. Parties prenantes du projet, Alain et Jean accompagnaient l’artiste dans ses tentatives de recrutement bienveillant sinon de persuasion amusée, allant jusqu’à porter eux-mêmes des T-shirts brodés par l’artiste à la paillette d’or aux noms des principales tenantes de la philosophie féministe. En outre, plusieurs fois par jour, Pascal Lièvre proposait au public la pratique « d’aérobics féministes », soit la lente et articulée chorégraphie des plus grandes pensées féministes. En effet, après un petit échauffement tout
symbolique, le public était invité à suivre les mouvements que l’artiste exécutait au ralenti en prononçant quelques-unes des phrases les plus célèbres des philosophes Simone de Beauvoir, Judith Butler ou Monique Wittig. En gros cela donne un « On ne naît pas femme, on le devient » ou encore un « L’hétérosexualité est le régime politique sous lequel nous vivons, fondé sur l’esclavagisation des femmes » rythmés par des balancements de bras, des jetés de jambes, sauts et autres étirements que l’on a plus l’habitude de pratiquer en salle avec une musique pop que dans le salon d’une famille ou les murs d’un espace d’exposition. Outre que l’expérience fut drôle et conviviale pour les visiteurs de l’Afiac, il va sans dire qu’elle restera gravée dans les mémoires, comme étant un remarquable moyen de rendre accessibles à tous les plus grands courants de pensées féministes et, une fois n’est pas coutume, d’associer en une oeuvre le corps et l’esprit, que l’on a trop souvent tendance à séparer. Autre action forte et symbolique, lors de l’inauguration de l’Afiac, l’artiste a tout simplement, avec la complicité de la maire du village, rebaptisé une place au nom de Monique Wittig, cette célèbre essayiste, romancière et militante féministe française décédée en 2003 et à laquelle la République a fait peu ou pas d’honneurs jusqu’à présent. Pour réparer cette injustice, Pascal Lièvre a permis de renommer temporairement la place centrale du village à son nom, utilisant pour ce faire une petite plaque violette plutôt que bleue. Et la maire de rappeler que seules 2% des rues françaises portent le nom d’une femme ! Gageons que l’édile saura pérenniser ce baptême fiacois en nommant de manière définitive la place du Four en place Monique Wittig.

Magali Gentet


Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley


Jean Biche | Plastic Queer

Jean Biche

Fiac 2015 – Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

L’artiste était reçu chez Alain et Jean Sudre Bech

Professional Dreamer

Figure des nuits bruxelloises et parisiennes, Jean Biche est un artiste aux multiples talents. Tour à tour styliste, DJ, illustrateur, maquilleur, strip-teaseur, artiste de cabaret, performeur et parfois tout en même temps, Jean Biche utilise son corps comme un médium artistique dont il décline toutes les ressources théâtrales et performatives. Son univers, peuplé d’images burlesques, baroques et inquiétantes, cherche à créer des fictions, des situations anormales et aborde les questions de rites, de sacrifices et de mutations en puisant ses références dans la culture pop, le cinéma et la musique notamment.
Questionnant les notions de genres, l’artiste prolonge ses réflexions identitaires dans le rituel du transformisme. Ainsi, à l’aide de maquillage, de masques, de postiches, de perruques, de déguisements, de prothèses et autres jeux de lumières, ce délicat jeune homme blond, cet ange androgyne, gracile et peroxydé « dans la vie », se transforme la nuit, sur les scènes de cabaret ou plateaux de théâtre, en véritable Créature, en sublimes et surréelles divas qui représentent chacune un « morceau » de son idéal féminin. Sans pour autant jouer des stéréotypes de genre qui sont censés définir ce qu’est une femme, Jean Biche incarne son propre fantasme qu’il sublime. Comme il le dit à propos de ses transformations : « Ce sont des
processus de sublimation. Je ne crée pas quelque chose, je pousse plus loin, mais je reste le même ». Est-ce à dire que Jean Biche utilise le transformisme pour dévoiler une identité individuelle autre ? Ou qu’il joue sur le trouble identitaire en apparaissant successivement et avec autant de qualités homme de jour et femme la nuit ?
À vrai dire, il semble plus simplement que l’artiste trouve là, grâce à la scène, le moyen d’exprimer sa féminité, à l’image des gravures de mode dont plus jeune il emplissait ses cahiers de dessin et que cette fois il incarne, comme il le précise avec humour, « de la vierge à la putain ».

jeanbiche3Quand j’ai invité Jean Biche à participer à l’édition Plastic Queer, d’emblée un problème se posait, celui de la relation avec l’habitant ou tout du moins de l’interaction de son projet avec la vie de ses hôtes qui accueillaient déjà Pascal Lièvre. Comment en effet proposer et réaliser un « objet » performatif sur trois jours et comment le donner à voir à un public le plus large possible ?
Sa pratique de la performance est tellement introspective qu’il fut finalement décidé d’une unique représentation le samedi soir sur la place du Four au coeur du village. Une performance pour laquelle l’artiste allait créer un « matériel unique ».

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Ainsi, entre les fumées de saucisses grillées, la harangue des cuistots du food truck et le brouhaha des visiteurs attablés sous l’énorme chapiteau, est soudain apparue, sortant du café
de Fiac, accompagnée et protégée comme le serait une star de cinéma, une créature sublime à la taille de guêpe toute minimale, juchée sur des escarpins de 12 cm et vêtue d’une longue robe fourreau à paillettes.
Oublié Jean Biche !
Voilà que l’absolu féminin traverse la scène, la conjugaison d’un sex-symbol et d’une diva, la fusion du sex-appeal de Marylin Monroe et du charme glacé de la blonde hitchcockienne Kim Novak. « Sitôt que je revêts des apparats féminins, je deviens toutes mes icônes à la fois : la démarche, la voix, le port de tête, même les idées changent, c’est un spectacle à la fois merveilleux et terrifiant que de se voir chavirer » nous indique l’artiste.
Plongée dans la nuit noire, doucement éclairée au moyen de lampes de poche qu’elle dirige sur elle, cette créature fardée de rouge, successivement habillée, dévêtue puis corsetée dans une gaine digne des années 50, performe chants et récits en jouant avec les projections d’images vidéo qui dansent sur son corps de manière abstraite. Dans cet univers optique, Jean Biche devient une icône glamour qui voyage de films en films murmurant différentes chansons qu’elle mélange à sa guise, puis fixant le projecteur « tel un animal pétrifié » dans les phares d’une voiture, s’allonge sur le sol pour se déshabiller langoureusement. Ceci donne une performance incandescente, un mélange de détresse et de force qui évoque l’inquiétante étrangeté du cinéma de Cassavetes et le jeu de son actrice fétiche Gena Rowlands. La performance que Jean Biche a proposée pour l’Afiac est très clairement en rupture avec ce que l’artiste produit habituellement pour ses spectacles de cabaret à la fois drôles, excentriques et subversifs.

jeanbiche8 jeanbiche7 jeanbiche6« J’avais une envie très claire de rupture avec le cabaret » nous dit l’artiste, « j’ai voulu envisager le spectacle comme une oeuvre plastique ». En fait, une oeuvre « Plastic Queer », si j’ose dire, qui démontre à quel point la féminité n’a rien d’inné et qu’elle n’est qu’une construction culturelle qui peut être jouée, imitée et à merveille incarnée comme le réalise ici Jean Biche. Une rencontre a été organisée avec le public le lendemain matin de la performance sur la même place du Four. Là, Jean Biche nous a parlé de sa vie, son parcours intime et professionnel, son identité, son travail artistique. Si vous n’avez pas eu la chance d’y assister, une vidéo de son intervention aux Subsistances de Lyon en 2013 vous permettra de mieux cerner le personnage. Il s’agit du « Rapport d’ano®malie » de Jean Biche : youtube.com/watch?v=TVnThC43Knc

Magali Gentet

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Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley


Evor | Plastic Queer

Evor

Fiac 2015 -Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

L’artiste était reçue chez Chantal et Jacques Terre

 

Beyond, hommage aux créatures

7 longues-vues constituées de tubes en métal chromé contenant chacun un caisson lumineux qui éclaire des impressions numériques, interprétations dessinées d’une fleur carnivore, d’un champignon, d’une orchidée, d’un germe de blé, de pissenlits, de lunaire.
100 cm de long × 16 cm de diamètre

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Panthéon stellaire

La terrasse de Chantal et Jacques Terres est transformée en un observatoire high-tech en parfaite harmonie avec l’architecture de la maison. Une série de télescopes chromés visent le ciel d’un paysage époustouflant de collines et de vallées à perte de vue. Quel est donc l’objet
de cette observation ? Chaque lunette nous donne à voir un élément d’une constellation de fleurs étranges, noires et scintillantes ; elles dansent au gré d’effets kaléidoscopiques ou semblent se perdre dans un Palais des glaces. Échappant ainsi à une vision statique, ces dessins s’animent tels des fantasmagories suggérant parfois des formes phalliques, vulvaires ou anales. Ces sept télescopes nous permettent en fait d’accéder aux galaxies queer le temps d’un vibrant hommage à celles et ceux, énigmatiques et flamboyants, qui ont marqué Evor de l’adolescence à l’âge adulte par leur courage, leur esthétique et la sublimation de leur vie, ces êtres hors du commun aux destins parfois tragiques, partis, selon les mots de l’artiste « en laissant derrière eux une traînée de paillettes et de répliques étincelantes. Leigh Bowery, Claude Cahun, Quentin Crisp, Marlene Dietrich, le Chevalier d’Éon, Klaus Nomi, Oscar Wilde…».

Beyond est en quelque sorte un Panthéon stellaire dédié aux créatures mises au ban de la société pour avoir été libres et déterminées. Nous sommes bien dans le monde d’Evor et plus particulièrement dans sa zone astrale et sacrée ; pour y entrer il faut être un peu dandy, un brin sophistiqué et subversif ou tout simplement curieux d’expériences esthétiques inouïes.

Patrick Tarres

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Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley


 

 

Tony Regazzoni | Plastic Queer

Tony Regazzoni

Fiac 2015 -Des artistes chez l’habitant

Un événement de l’AFIAC
Commissaire général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Magali Gentet, Directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain et Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées

L’artiste était reçue chez Sandrine et Greg Mantel

 

Equinox #02, 2015

Impression numérique sur bâche PVC,polystyrène, crépi, peinture acrylique, peinture aérosol, ruban adhésif, écran LCD, lumière noire
Dimensions variables

Celebration (Pretty Dancing), 2011

Video HD couleur, 7’58”
Musique originale : The Miracles Club, Portland
Oeuvre produite avec le soutien de la DRAC Île-de-France (ministère de la Culture et de la Communication) et du Parc Saint-Léger, centre d’art contemporain de Pougues-les-Eaux

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Dithyrambe

Tony Regazzoni est reçu à Fiac par une famille récemment installée au village et qui vient de rouvrir le café multiservice. Greg, heureux tenancier de ce commerce de proximité, a une solide expérience de la nuit : il fut videur puis organisateur de soirées à Paris et en Île-de-France. Très vite esquissé, le projet de Tony ravit Greg, ça se passe au comptoir du bistrot
où il est question de lumière noire et de cocktails fluorescents. C’est la verrière faisant office d’entrée du lieu qui est occultée et transformée en une installation faite d’impressions sur bâches, de sculptures aux formes minimales et aux évocations ambigües, de tabourets reproduisant des colonnes gréco-romaines, le tout réagissant à la lumière noire – un concentré de clubbing années 80/90 organisé autour d’un écran plat qui diffuse en boucle le film « Célébration (Petty Dancing) », réalisé par l’artiste cinq ans avant et dont il dit : « Mon appréhension du queer s’est développée grâce à une « famille » que j’ai rencontrée à mon arrivée à Paris il y a 10 ans. J’ai connu et appris ce qu’était le queer non pas à travers des livres mais à travers la fête et les rencontres du week-end. À l’époque, il n’y avait pas encore cet engouement qu’on retrouve aujourd’hui pour cette terminologie de « queer ». Paris n’était pas vraiment une fête, les moments de rassemblements festifs se faisaient rares. Un seul bar et un seul club nous réunissaient chaque week-end, quels que soient notre « genre », notre couleur ou notre sexualité. La fête nous permettait de célébrer nos différences sans le moindre clivage. Tous nous étions beaux dans notre représentation et notre appétit de célébration. C’est donc ce qui m’a porté en réalisant ce film.

Rendre hommage à cette beauté qui frôle l’universel, en réunissant une grande partie des protagonistes de cette famille recomposée qui s’est épanouie dans ce mouvement queer et l’a rendu palpable et excitant. » De jeunes gens dansent sur Ocean song de The Miracles Club dans un espace matérialisé par des formes géométriques abstraites faites de matière fluorescente ou de traits de lumière captés par de la fumée. La musique est électronique et les danseurs très éthérés. Equinox est le nom de la boîte de nuit où nous nous trouvons et qui n’en est pas une. C’est juste une image en deux ou trois dimensions dans laquelle nous prenons place pour y participer en adoptant la posture inhérente au dispositif des night clubs où la piste de danse concentre tous les regards périphériques. La géométrie semble tout régler dans la conception de cette oeuvre, les mots, les formes, les images et l’organisation de l’ensemble. Ainsi, un équinoxe est un instant de l’année où le soleil traverse le plan équatorial terrestre, mais c’est aussi un des deux points d’intersection de la ligne des équinoxes avec la sphère terrestre. Ces géométries semblent cependant s’apparenter davantage au symbolique qu’au formel et l’on se sent parfois dans la peau d’un archéologue à la recherche de sens devant un monument mégalithique de type Stonehenge. Quel est donc le culte auquel nous assistons ? Il y a bien sûr une célébration par le rassemblement périodique d’une communauté qui veut renforcer sa cohésion, ici par la danse, la musique, le culte de la fête, du plaisir et des différences, une sorte de dithyrambe, cet hymne religieux de la Grèce antique, chanté par un choeur d’hommes et accompagné d’une danse représentant l’emprise de Dionysos sur les hommes.

Patrick Tarres


Commissariat général : Patrick Tarres
Commissaires invités : Karine Mathieu, Chef de projet d’exposition et de diffusion en région / les Abattoirs / Frac Midi-Pyrénées et Magali Gentet, directrice et commissaire des expositions du Parvis, centre d’art contemporain

Les artistes

Anna Burlet, Hélène Mourrier, Tony Regazzoni, Evor, Jean Biche, Pascal Lièvre, Romuald Dumas-Jandolo, Red Bind, Delphine Balley