David Mickael Clarke – VOIRe – + si affinité 2012

David Mickael Clarke

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Alice et Michel Seon.

« The Flying Black Cow Club (version # 01) / Flying Black Cows »

« Le grand boullier / Jeu de quilles /

Portrait d’une machine # 01»

J’ai récemment découvert le projet pour la vie rurale mené par Le Corbusier dans les années 30. Le projet a été et est toujours radical. L’ancien village de Piacé (Sarthe) aurait été rasé et remplacé par un village coopératif : Piacé-le-radieux. Dans le village, Le Corbusier a pensé à un club, un lieu de rencontre et d’échange, un lieu où les paysans puissent participer aux activités culturelles ou sportives, ou tout simplement partager un verre et dialoguer. Ce serait grâce à cet échange d’idées, que le village pourrait évoluer. Selon Le Corbusier, le club pourrait être perçu comme le cerveau du village. Par la suite, j’ai décidé de m’interroger sur cette idée d’un club.

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Un jour, en traversant la Mayenne, j’ai croisé une manifestation agricole remarquable. Une usine avait pollué le bocage. Le lait produit par les deux troupeaux de vaches est devenu imbuvable. Ainsi les vaches ont été abattues. Les paysans ont exprimé leur malheur d’une manière très sculpturale. Six potences ont été érigées et des têtes de vaches, découpées dans du carton noir, ont été pendues. Cela a été un geste fort. Comme des cerfs-volants, les têtes se sont envolées dans le vent. En réaction automatique, j’ai prononcé à haute voix, « Wow ! Flying Black Cows ! » et par la suite, « Flying Black Cows … ceci pourrait être le nom de mon club ! »

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Dans le Tarn, Alice et Michel Séon m’ont témoigné de leur vie dans l’agriculture. Ceci a été un long parcours à partir du remaniement de la plaine, à travers une époque d’exploitation intensive, afin d’arriver à un grand projet de développement durable. Aujourd’hui, ils sont à la retraite et leurs enfants ont repris la ferme. Pourtant, ils ne sont pas pour autant désengagés. Alice et Michel Séon ont vécu leur vie professionnelle avec passion. Ils continuent d’être passionnés par les challenges qui confrontent les paysans d’aujourd’hui et qui confronteront les paysans de demain. Ce sont des gens très responsables et ils tiennent à laisser la terre dans la même condition qu’ils l’ont trouvée.

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J’ai décidé de commencer mon histoire des « Flying Black Cows » chez eux, d’une manière idyllique, bucolique, optimiste… mais en même temps, surréelle… comme un tableau de Constable repris par Magritte. Fat and happy, flying cows !
Lorsque j’ai fait un tour de la ferme, je suis tombé sur un énorme tas de pneus. Je me suis dit que je pourrais m’en servir pour faire une sculpture, mais quand j’ai suggéré l’idée à Alice, elle avait l’air troublée. C’était la génération d’Alice et Michel qui a amené les pneus aux fermes. Ils s’en sont servis pour la construction des silos.

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Aujourd’hui, les jeunes agriculteurs utilisent d’autres méthodes, ainsi les tas de pneus pourrissent, polluent et gâchent le paysage. Alice et ses camarades ont créé une association afin d’étudier le problème avec l’espoir de pouvoir assurer le recyclage. Pour commencer, ils ont recensé tous les tas de pneus usés qui dorment dans la communauté de communes. À cette date, ils ont trouvé seize mille huit cent quatre-vingt-quatorze pneus.
Mon père vient d’Hong Kong. Un souvenir d’enfance : mon père faisant ses calculs sur son boulier chinois. Le boulier chinois est une machine très ancienne. Il y a très peu d’écart entre sa forme et sa fonction. La fonction est d’assister l’homme à répondre à ses challenges. J’ai songé à créer un boulier chinois géant et écrire cet énorme chiffre dessus.

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Retournons au projet de Le Corbusier et à son idée d’installer un club au coeur du village coopératif. C’est assez clair que pour lui, le club aurait été beaucoup plus qu’un simple équipement culturel. Plutôt, il a vu le club comme un outil de travail. J’ai commencé à réfléchir sur les différents prétextes de rencontres post-travail qui existent dans le milieu rural en France. L’apéritif et le jeu de pétanque sont sûrement les plus populaires. Depuis Fluxus, l’art est souvent perçu comme lieu de rencontre, mais pourrait-t-on penser le jeu de pétanque comme outil de travail ? J’ai décidé d’élaborer un projet hybride… une installation participative, un lieu de rencontre… ou comme Daniel Buren aime dire… un outil visuel. J’ai combiné le jeu de pétanque français avec le jeu de quilles qui se trouve souvent à l’arrière des « pubs » en Angleterre. J’ai basé la forme de mes quilles sur le boulier chinois. Chaque quille représente un chiffre différent, de un à dix.
Alice et Michel sont originaires de la Loire, près de St-Étienne. Le père d’Alice a été champion de boules lyonnaises. Elle nous a permis d’utiliser ses boules lors de la manifestation. Les quilles ont été réalisées par Vincent Verlinde, un artisan local, qui a lui-même accueilli un artiste il y a un an, lors de la précédente manifestation.
Avec mon intérêt renouvelé pour les jeux de « bowling », j’ai décidé de rendre visite et de découvrir le bowling du Mans. J’ai été accueilli par Frédéric Le Terrec. C’est son père qui a créé le bowling à l’époque post-guerre. À l’arrière des pistes, tournent toujours des vieilles machines qui trient les boules et les quilles. Elles font « clic », elles font « clac », elles ronronnent, elles bourdonnent. Elles sont arrivées en France, avec les films westerns, Elvis Presley et les premiers tracteurs. Ainsi au coeur d’une ville industrielle comme Le Mans, je me suis trouvé en train de songer à nouveau à la France rurale, le remembrement, l’industrialisation du bocage et l’agriculture intensive… ce à quoi Alice et Michel ont renoncé. Il m’a semblé que j’ai bouclé la boucle.
Pour mon projet, pour AFIAC 2012 à St-Paul-Cap-de-Joux, j’ai essayé de faire résonner toutes ces histoires qui sont venues à ma portée par les aléas de la vie.
David Michaël Clarke

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clarke, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Rodolphe Huguet – VOIRe – + si affinité 2012

Rodolphe Huguet

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu Babeth et Christelle Viala, Jeau-Loup et Mathilde Albert.

« Sans titre / Les chutes »

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Disons-le tout net. Rodolphe Huguet s’intéresse aux ressources humaines. Non qu’il aime à gérer sa petite entreprise au plus près des bénéfices, mais il reconnaît un goût certain pour l’apport de l’autre. Porté par l’expérience de la rencontre, le goût des savoir-faire et la relecture des cultures des bouts du monde, il construit depuis 1997 une oeuvre protéiforme qui navigue du dessin à l’installation. Nimbées d’humour et de gravité, ses constructions faussement naïves conjuguent à l’envi des préoccupations plastiques imposées par les situations et un regard souvent piquant sur la société.
Ainsi, au milieu de la vaste pelouse de sa famille d’accueil, Huguet a disposé en cercle d’étranges créatures au ventre dodu et au sourire grinçant. Leur bedaine vert d’eau est formée du réemploi de ballots de paille plastifiés, trouvés sur place. Tenus par des outils agricoles – bêches, fourches, binettes – glanés sur le site, quatre châssis de toiles perforées laissent entrevoir un maillage en vannerie. Enchâssée dans ce dernier, une quincaille de casseroles, passoires, assiettes… donnée par les gens du village, dessine des visages aux contours marqués à coup de bombe. L’assemblage prend les allures d’un bricolage enfantin où regards ronds et bouches ouvertes semblent interpeller le visiteur au centre du cercle. « Miam miam » nous lancent-elles, les yeux gonflés de gourmandises. Comme déformés par la faim – des plats à la place des yeux – les visages de Rodolphe Huguet traduisent avec humour l’obsession agricole de nourrir toutes les bouches…

D’une approche plus poétique encore, l’installation Chute est directement issue de la rencontre d’Huguet avec sa famille d’accueil. Son hôte est employé d’une société de production de cuirs de luxe. Huguet y fait récupérer des chutes de cuirs multicolores qu’il découpe au format des parpaings du mur nu de la grange amiliale. Des chutes à la Chute, le titre renvoie autant à l’origine des cuirs voués à la destruction, qu’à l’effet produit au mur par leur amoncellement coloré tombant en cascade… Détournant la finalité et l’usage de cesluxueux détritus, Huguet construit une sorte de mur « Hermès » ballottant au vent, comme un précieux cadeau offert à ses accueillants…
Yvan Poulain

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Robert Milin – VOIRe – + si affinité 2012

Robert Milin

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu par l’association Inici / jardins partagés.

« Nos petites résistances » 

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Les correspondances de Gérard Margerite, oeuvre de Delphine et Robert Milin suivi d’un entretien de Robert Milin avec Delphine Suchecki
Gérard Margerite est une personne déjà âgée, porteuse d’une certaine sagesse.
Tout se passe comme si, en lui, la vie n’avait pas réussi à éroder une capacité de fraîcheur et d’étonnement devant ce qui advient. Retraité, photographe amateur, il vit dans un centre ville. Il aime se promener et observer l’urbain, mais aussi partir en vacances avec sa petite fille Léa, à la découverte d’autres univers. Ce promeneur inlassable est souvent attiré par les vitrines, ces éléments incontournables de nos paysages urbains. Ce sont elles qui se donnent avec force à voir, pour tenter de créer en nous le désir d’acheter. Mais les promenades paysagères, durant les vacances, sont, pour Gérard Margerite, tout autant d’occurrences pour sa curiosité et son incessante interrogation devant ce qui se manifeste.

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Parfois, il se sent ébranlé tant les situations, les sollicitations commerciales, les états de fait, dans l’espace vécu, lui semblent décalés par rapport à ce que lui s’imaginait pouvoir y trouver. Alors ne pouvant pas rester à ruminer ses pensées, il décide d’écrire et de transmettre. Et il le fait à l’adresse des responsables, leur disant ses inquiétudes, ses interrogations, comme parfois aussi ses ravissements.

NB : le travail plastique se présente sous la forme de lettres écrites à la main, avec photos jointes. Ces documents sont expédiés aux responsables. Photocopies des lettres, photos et réponses des responsables, sont présentées dans de petites vitrines murales.

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ENTRETIEN de ROBERT MILIN AVEC DELPHINE SUCHECKI

AVRIL 2013
Depuis 20 ans, tu construis tes oeuvres grâce à des rencontres avec des personnes souvent issues des classes populaires. Régulièrement le monde de l’art te reproche de les instrumentaliser au motif que ces personnes ne comprendraient pas les codes de l’art. A l’inverse pour ton documentaire Un Espace de l’Art on te reproche de ne pas avoir donner plus la parole à ces personnes non spécialistes de l’art et donc d’avoir écarté de la prise de parole les gens du quartier faisant l’objet de ton film. Nous avons alors l’impression d’une difficulté en France à appréhender les classes populaires, simplement, comme si, sorties de la caricature comique ou de la détresse sociale leur présence venait déstabiliser les acteurs spécialisés du monde de l’art. En 1962, Annie Ernaux écrivain issue des classes populaires, écrivait dans son journal : « Je vengerai ma race » et elle a depuis construit une oeuvre consacrée au monde d’où elle vient. Pour toi cela semble s’être fait presque à ton insu, sans cette volonté politique, dans un premier temps, comment pourrais tu situer ton travail en regard de celui d’Annie Ernaux ?
A mes débuts mon désir était assez juvénile: simplement produire des tableaux, des images, des formes, impliquant des personnes dans des lieux. Je n’avais pas ce désir de « venger » une origine sociale et de faire de mon oeuvre un combat. Je pensais que l’art était une sorte de lieu déterritorialisé, un champ autonome, sans subordination à un système dominant. Mes références n’étaient ni sociologiques, ni politiques, elles étaient dans l’histoire de l’art, celles du paysage par exemple. Ainsi j’aimais les oeuvres de Brueghel, ses tableaux montrant des paysans étendus sur les chaumes de blé, lors de la pose de midi, durant la moisson. Dans les tableaux des maîtres flamands et néerlandais j’aimais la présence des gens placés dans des contextes de vie quotidienne, comme la beauté de la lumière dans une peinture rendant compte du monde. Les gens étaient là, vivants, rougeauds, mal dégrossis, dansant, buvant, chantant, sans retenue ni réserve.… Que c’était différent de Poussin peignant des bergers en Italie quelques années plus tard! Les pasteurs de Poussin apparaissaient dans des peintures quasi mythologiques, les paysans étaient irréels comme des pâtres romains dans des paysages déréalisés. J’ai bien vu, progressivement, la plus-value symbolique que l’Académie accordait à Poussin – peintre d’idées – et le peu de valeur symbolique donnée à la même époque aux peintres hollandais de paysages, genre jugé mineur, car trop vernaculaire. Ce sont les positions de pouvoirs, celles de la valeur symbolique donnée aux oeuvres faisant la place à l’aristocratie, aux mythologies, qui m’ont fait descendre de mon piédestal. J’ai certes mis beaucoup de temps à m’en rendre compte mais progressivement j’ai définitivement perdu tout idéalisme vis à vis de l’art et des artistes. Et je trouve qu’aujourd’hui encore, les mêmes hiérarchisations demeurent et particulièrement en France malgré tous les travaux qu’a pu faire Pierre Bourdieu pour analyser, dans notre pays, les processus de distinction. Je me sens proche d’Annie Ernaux dans la mesure où je cherche, comme elle, à travailler sur des objets éloignés de ce que l’art ou la littérature donne généralement à voir et sans recherche de plus value esthétique: la « belle langue » en littérature ou le « bel objet » en art. Le fait que je m’immerge dans des milieux de vies populaires, un peu comme le ferait un sociologue, par une forme de « translaboration » où la créativité des gens est valorisée, me rapproche aussi de l’oeuvre littéraire d’Annie Ernaux. La grande différence est que je ne travaille pas sur un matériau directement autobiographique et sur une expérience de vie où la trajectoire personnelle est d’emblée en jeu. Mon grand respect pour l’oeuvre d’Annie Ernaux vient de ce qu’elle a réussi à sortir de l’autobiographie narcissique pour aller, par une écriture distanciée, vers un lieu où l’intime devient du social et la petite histoire personnelle une mémoire collective.
Une chose est sûre: pour moi l’art n’est pas un domaine où cultiver une beauté pure ou un savoir désintéressé, c’est un champ de lutte symbolique que se livrent différents groupes sociaux.
Depuis quelques temps tu cherches à prolonger cette relation que tes oeuvres créent entre l’art et la société. Au delà de la participation des gens à tes oeuvres, tu as décidé de rechercher plastiquement comment aller à la rencontre de la société et susciter des pensées. S’opposer au vieil adage disant que « des goûts et des couleurs, on ne discute pas ». Pourquoi décides-tu de faire ce chemin ?
Comme tu l’as dit, depuis plus de 20 ans, je réalise des oeuvres avec la collaboration de personnes tenues généralement à l’écart de l’art et des musées. Elles ont souvent pris une place en collaborant bénévolement à mon travail. J’estime à environ 200 le nombre de ces personnes qui en France, en Autriche, en Italie, en Tunisie, m’ont aidé en me confiant des objets, des documents, acceptant de collaborer dans mes processus. J’éprouve le besoin de porter au jour les discussions souvent confidentielles que nous avons eues sur l’art en général et sur mon travail en particulier. Il me plaît de provoquer des échanges, à partir de mes oeuvres, sur l’art, en convoquant le point de vue de personnes à qui on ne donne généralement pas la parole puisqu’elles sont peu spécialisées en art. Je le fais sous forme d’entretiens individuels, en face à face, par le truchement d’une caméra placée entre l’interlocuteur et moi. Je le fais avec l’aide du microphone et du son bien sûr, mais aussi par des plans fixes en vidéo assez resserrés, l’interlocuteur étant placé devant un fond neutre de domicile ou de lieu de travail.
C’est aussi une manière de travailler sur quelque chose qui ne serait pas assimilable au goût cultivé de Kant qui est devenu celui d’intérêts sublimés par l’art. Bien des gens, issus notamment de milieux défavorisés, sont à la recherche de l’art. Et il est préoccupant de les assigner à la consommation de masse de biens culturels. Ce ne sont pas forcément les gens qui ont fait de l’art et des biens culturels une marchandise, ce sont les pouvoirs économiques et ceux du marketing qui les ont manipulés.
Pour moi si l’art n’est pas là pour créer du lien social, il est certainement le produit d’une relation sociale et pas obligatoirement commerciale. Pourquoi ne pas en parler plus ?
Il y a enfin, ce constat actuel : je trouve que les artistes et les experts en France, parlent généralement assez peu d’art entre eux. C’est pour cela que j’avais réalisé, il y a déjà presque deux ans, un premier film documentaire de dialogues entre moi, des artistes, des historiens d’art, des critiques, des gens intitulé Un espace de l’art. Et ces préoccupations sont à rapprocher de ce qu’est devenue la critique. Depuis une trentaine d’années le rôle du commissaire d’exposition et du critique est quasiment devenu interchangeable. La professionnalisation des réseaux d’expositions et de ventes d’art contemporain a donné aux commissaires d’expositions-critiques un rôle majeur pour la viabilité économique des artistes, qui bénéficient alors de la promotion médiatique assurée par les revues de presse puis les musées, les centres d’art et les galeries. Le développement du débat et de la pensée en souffre.
Je recherche des formes de rencontre et d’enrichissement de la pensée en y convoquant aussi bien des spécialistes que des non spécialistes. Je ne veux pas opposer des compétences à des non-compétences, ce serait démagogique et réducteur. Je cherche à voir ce qui travaille dans l’art et dans les classes sociales et cela devient aussi un espace de respiration pour mon propre travail.
Dans tes oeuvres tu choisis le plus souvent une mise en forme légère, comme tu l’as souvent dit où le « coefficient d’art » est assez réduit. En regardant tes Solutions Pratiques, tes Portraits de Contrôleurs de la SNCF ou de Paysans du Quercy par exemple on pourrait penser que peu à peu tes oeuvres constituent une mise en archives de pratiques et de personnes qui sont peu mises en avant. Comment situes tu tes oeuvres par rapport aux pratiques dites documentaires ? Es tu plus ou moins consciemment dans un désir de leur donner une place, une image ?
Oui bien sûr il y a quelque chose de cet ordre dans mon travail: mettre en avant des personnes qui sont peu représentées parce qu’elles sont de l’ordre du commun. C’est ce que j’avais fait notamment dans l’oeuvre Cleunay : ses gens à Rennes. Elle est issue d’une commande publique et se présente sous la forme de neuf grands panneaux en aluminium, placés sur les accotements de deux boulevards. C’est la réplique formelle des panneaux dits d’animation paysagère que l’on trouve au bord des autoroutes. Le pouvoir technico-politique utilise cette communication quand il invite les automobilistes à regarder un paysage considéré par lui comme «remarquable». Dans mon oeuvre à Rennes, je représente de manière anonyme des habitants du quartier dans leur contexte de vie ordinaire. J’ai pris beaucoup de plaisir à venir à Rennes, monumentaliser le banal, tandis que le pouvoir lui monumentalise généralement ce qui nous domine.
Cela dit je ne cherche aucune complaisance éthique ni un art réaliste destiné à venir accréditer une vertu morale du peuple dominé. Je m’évertue à me tenir à distance d’un fonctionnalisme social et dénonciateur des injustices que je perçois dans l’histoire des débuts du documentaire photographique à l’instar de Dorothy Lange aux USA et d’une manière moins empathique, par Walker Evans, commandités par un organisme comme la mythique FSA américaine. Je me méfie aussi des images véhiculées, comme celle du bon ouvrier ou du bon artisan. Je ne suis pas venu pour réhabiliter, comme les Franciscains, le modeste charpentier, père putatif et nourricier de la vierge Marie, que serait le bon Saint-Joseph. Je me garde donc de venir sanctifier le peuple même si je travaille beaucoup sur cet objet de pensée et de travail d’artiste: qu’est ce que le peuple, qu’est ce que l’image de gens du peuple ? Voilà une part importante de mon programme. Mais j’ai bien conscience qu’il faut se grader d’être schématique surtout en France où la représentation des catégories populaires pose problème. Ainsi dans le monde de l’art français, une part non négligeable de la réception critique à propos de mon travail, peut se résumer de la manière suivante: j’instrumentaliserais des personnes participant à mes oeuvres alors que les gens collaborant à mon travail, ne posséderaient pas les clefs du monde de l’art. Je me défends souvent par une question renvoyée à mes contradicteurs: notre société serait elle dans une incapacité à penser les classes populaires autrement que par le discours militant d’émancipation ou celui du rire et du grotesque ?
Ma manière de donner une place aux gens serait plutôt à rechercher du côté des prises de position de Georges Orwell, récemment explicitées par l’écrivain Bruce Bégout. 1984 d’Orwell est venu écraser par la critique (encore un effet du spectaculaire) une deuxième partie de l’oeuvre de ce grand écrivain engagé aussi dans des mondes ordinaires. De La Décence ordinaire de Bruce Bégout – livre publié en 2008 chez Allia – vient explorer la notion de Common decency, théorisée par Orwell et analyser cette approche politique de l’écrivain anglais, comme ses possibles résonances contemporaines. (Voir les livres d’Orwell comme Dans la dèche à Paris et à Londres) Orwell perçoit très souvent dans le révolutionnaire un homme gouverné par la haine de soi et par l’absence d’ancrage dans la vie quotidienne des gens fût elle basique et faite de ruses du quotidien pour reprendre une expression de Michel de Certeau. Bruce Bégout m’a fait encore mieux comprendre que, ce que nous avons de partageable entre nous, réside dans les gestes les plus ordinaires. C’est ce que j’avais voulu explorer dans mes petites saynètes Solutions Pratiques. Le quotidien est porteur, par les gestes et les pratiques les plus minuscules, d’une capacité de compréhension, de mutualité et d’attachement entre les hommes. On approche là aussi la recherche de Joan Tronto sur les idées de « care ».

 

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Marie Sirgue – VOIRe – + si affinité 2012

Marie Sirgue

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Stéphanie Barreau, Richard Lauga, et leur fille Léonie.

« La Naïade » 2012

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Modelage en argile crue, arroseurs de jardin, armature en fer, bois et mousse expansive
production AFIAC, © Yann Gachet
(…) Marie Sirgue investit un jardin des plus classiques. Pelouse verte, arbres et fleurs bien alignés s’épanouissent simplement de toute l’attention qui leur est portée. Un détail peut-être apporterait à la maison tout le lustre du modèle idéal de la villa classique. Une sculpture de jardin ! Réminiscence lointaine de celles des dieux et des ancêtres qui ornaient l’atrium des riches villas romaines. Marie Sirgue érige une naïade à la nudité parfaite parmi bégonias et marguerites. Coutumière des combinaisons incongrues, elle réalise sa sculpture en terre crue et dispose à ses côtés un système automatique destiné à l’arroser durant les trois jours de la manifestation. L’intention est limpide, détruire par l’eau cette divinité des rivières grecques. Jour après jour, la statue se désagrège lentement, formant aux pieds de la nymphe une flaque boueuse.

Oeuvre rassurante au départ que ce nu féminin, à l’image des sculptures de jardin qui vous sourient au bord des routes. Mais le spectacle plaisant vire très vite au cauchemar, la terre dégoulinante défigure la belle, boursoufle son corps puis laisse apparaître le squelette de la silhouette, armature bricolée, sorte de squelette hybride de bois et de plastique qui confère au drame un caractère encore plus monstrueux. L’oeuvre n’existe ici que par sa propre dégradation. (…)
Manuel Pomar

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Marie-Johanna Cornut – VOIRe – + si affinité 2012

Marie-Johanna Cornut

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Stéphanie Barreau, Richard Lauga, et leur fille Léonie.

« Côté jardin »

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(…) Marie-Johanna Cornut jette son dévolu sur une petite cour cachée. Dans cet espace exigu qui jouxte la route et que surplombe la salle de bain, elle crée un jardin zen où le gravier, matériau principal, symbolise l’eau. Les rochers, la mousse et l’unique fleur sont les composants de cette image idéalisée de la nature. Sorte d’interface entre espace privé et public, placé idéalement près d’une source, la salle de bain.

C’est depuis la fenêtre de celle-ci, à l’aide d’un râteau de plus de six mètres spécialement fabriqué par un menuisier de la région, que les visiteurs peuvent modeler à leur gré le jardin. Fidèle à la tradition, composé rigoureusement dans une économie de moyens, il peut être contemplé ou recomposé. Tout comme l’art, les jardins japonais exigent un effort du regard. Un effet si loin si proche fait de cette proposition une sorte de jardin frustrant. Même si le râteau est là, adossé à la fenêtre, il est lourd, imposant, peu maniable et son usage entraînerait à coup sûr un saccage. Environnée du bruit des automobiles cachées par la palissade, c’est une zénitude pratiquement hors e portée. Comme si aujourd’hui il était impossible d’aménager un endroit propice à la relaxation et à l’abstraction. (…)

Manuel Pomar

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Regis Perray – VOIRe – + si affinité 2012

Regis Perray

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Kathy et Claude Peyrard

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Je suis le numéro 7
chez Kathy et Claude Peyrard
vendredi : 245 madeleines, samedi : 299 madeleines
dimanche… 384 madeleines.
Les madeleines de Régis dans la cuisine de Claude :
125 g sucre
4 oeufs, incorporés un par un125 g farine tamisée
125 g de beurre ramolli, presque fondu
un demi-sachet de levure et un sachet de sucre vanillé naturel
une petite cuillère à café de rhum blanc agricole
thermostat 7, environ 8 mn avec un bon four

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Grand Safari Mouches pour trois jours sur la Terrasse du restaurant-bar
Les Glycines à Saint-Paul-Cap-de-Joux

 

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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IKHÉA©SERVICE N°58 – VOIRe – + si affinité 2012

IKHÉA©SERVICE N°58

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Sabine, Djemel Bessioud et leurs enfants.

« C’est bien assez que d’être !»

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_IKHÉA©SERVICE N°58 : « rompre l’enchaînement des actions efficaces ».
Perturber, contrarier.
_ Glitch : « Beaucoup plus de moins ! ». Il y a pléthore de tout.
Soustraire est donc Le geste que nous favorisons.
Participer c’est :
_ mettre un mode d’emploi en pratique.
_ commander la mise en pratique d’un mode d’emploi.
_ proposer un nouveau mode d’emploi.
_ proposer la variante d’un mode d’emploi déjà mis en pratique au moins une fois.
_ acquérir un de nos services.
Des situations périlleuses, des mobiles contestables : tout cela, et beaucoup plus,
forme les contours d’une éthique qui exhorte au danger.
Plus notre attitude est injustifiable, plus nous la trouvons bonne.
Notre philosophie : l’imprévu radical.

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Marie Aerts – VOIRe – + si affinité 2012

Marie Aerts

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Marianne Delaunoy..

« Révolte »

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« L’homme est la seule créature qui refuse d’être ce qu’elle est.  »
Albert Camus, L’homme révolté, 1951.
Dès mon arrivée, je fus saisie par le cadre atypique offert. Un mûrier majestueux trônait au milieu du jardin d’un ancien presbytère datant du 18e siècle. Ce décor enchanteur était à la mesure de l’hospitalité de Marianne Delaunoy. Nos nombreuses et intenses discussions ont inspiré l’installation « Révolte ».
Cette oeuvre met en scène un costume inerte pendu à un arbre et entouré de drapeaux noirs et blancs.
Récusant un pouvoir toujours plus écrasant, refusant les conditions de sa détention, le corps de cet individu s’évapore, s’affranchit de son uniforme, le costume devenant ici un habit carcéral, un symbole d’enfermement. Telle une mue, ce corps se libère et se transforme pour une nouvelle vie. Ne reste plus que sa carcasse accrochée à ce noeud de pendu.
Semblable à l’uniforme du corps vide, ces drapeaux, à la fois symbole de trêve, par le côté blanc, et de guerre à outrance, par le côté noir, dressés tels des armes, manifestent la volonté d’une puissance ambivalente. Inspirés d’images d’archives de mises en scènes du pouvoir fasciste, et plus particulièrement celles du pouvoir nazi dans les églises, ces drapeaux sont placés de sorte à happer le corps du visiteur au coeur de l’installation.
« Révolte » résulte-t-elle d’un acte désespéré face à une peur de vivre, d’un sentiment de “fatigue d’être soi” ? Ou bien est-elle un signe de démesure où la révolte finit par se retourner contre elle-même : on désirait la liberté, on engendre la terreur ? Est-ce la suite d’un processus sans limites qui engendre la pire des inhumanités, celle où les justiciers se muent en criminels ? Ou encore manifeste-t-elle un besoin de liberté où le corps s’affranchit de ses chaînes afin d’atteindre son essentiel ?
Je vous laisse tout simplement l’apprécier…
Marie Aerts

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Jeremy Laffon – VOIRe – + si affinité 2012

Jeremy Laffon

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité

 VOIRe – art et embarras du choix

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu chez Carole et Charley Puyelo.

« Enlever les roues, couper les fils, sans perdre la masse
Epileptic sovereign, Pic vert, Hublots »

 

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(…) Jérémy Laffon à investi le jardin majestueux de Carole et Charley Puyelo. Nous n’y accèderons pas par la maison, mais par une ruelle qui conduit directement sur le lieu d’intervention de l’artiste. Dès que nous nous engageons dans cette voie étroite, un bruit sec et répétitif rythme et accompagne nos pas jusqu’à un portail auquel est accrochée une mise en garde très électrique sous forme de pictogramme. Nous comprenons dès lors que la pièce proposée ici fonctionne en tension avec le spectateur, nous vérifierons très vite que c’est l’ensemble du contexte qui est mis sous tension dans un épilêpsis radical. Le rythme perçu dans la rue ne nous quitte pas, il change juste de tonalité et de source. Ici il provient d’un poste à clôture généralement utilisé pour parquer les animaux. L’appareil est connecté à une Jaguar Sovereign accidentée et sans roues posée sur une sorte de socle en bois. Les feux du véhicule clignotent au rythme impulsé par le poste à clôture. De toute évidence la voiture-sculpture est entièrement sous tension, le jeu (cher à Jérémy Laffon) consistera à vérifier l’hypothèse en s’armant de courage pour poser ses mains sur l’objet de luxe et d’art. Une deuxième forme est alors perceptible, celle invisible de l’électricité, peut-être la plus aboutie, sûrement la moins objectale. En s’éloignant un peu de la Jaguar, le premier claquement entendu dans la rue revient à notre oreille et nous attire au fond du jardin.
Au détour d’un massif se dresse un vieux portique en béton, carrément austère, franchement disgracieux, c’est le support idéal pour un pic vert mécanique fait d’un piolet articulé animé par un moteur d’essuie-glace. L’animal métallique et électrique s’attaque à un arbre aussi dur et froid que lui dans un concert minimal, obsédant et cruel comme un supplice chinois. À quelques mètres de là, une dépendance un peu délabrée s’appuie sur le mur d’enceinte du lieu. La porte de ce hangar à outils est percée de quatre hublots sans fonction apparente. Une lumière blanche et crue jaillit de ce nulle part mystérieux et stroboscopique. ‘Enlever les roues, couper les fils, sans perdre la masse’, est le titre général, il comprend ‘epileptic sovereign’, ‘pic vert’ et ‘hublots’. Le tout est épileptique au sens grec, le nouveau comme l’ancien, Jérémy Laffon a mis la main sur le jardin et nous prend par surprise.(…)

Patrick Tarres

 

 

 

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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Marion Pinaffo – VOIRe – + si affinité 2012

Marion Pinaffo

Saint-Paul-Cap-de-Joux  2012  –  + si affinité VOIRe

Un événement de l’AFIAC

Commissaire d’exposition : Patrick Tarres, Manuel Pomar, Yvan Poulain

L’artiste était reçu par l’association Sainte-Cécile-de-Plane-Sylve

« Péchés aux canards »

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(…) Tout a commencé le vendredi 29 juin 2012. Il est 19 h 30, la place de Saint-Paul-Cap-de-Joux connaît un déréglage de temps et d’espace. Les pétanqueurs se sont déplacés sur l’aile gauche des allées de platanes, en lieu et place de leur aire de jeu habituelle, deux rangées d’échafaudages encadrent un grand bassin dont l’eau est du même bleu que l’affiche de l’événement. La foule des invités grouille autour d’un buffet multicolore flottant parmi des petits canards en plastique ; il est agité par des bateaux à moteur miniatures télécommandés par des enfants médusés et heureux. Non moins enthousiastes, les adultes sont transportés dans une ambiance balnéaire poétisée. Des serviettes en papier sont accrochées en guirlandes de fanions imprimés vichy. Les rayons du soleil s’égarent en éclats de joie en traversant un mur de bouteilles déjà vides mais très colorées. La magie opère et je ne serais pas surpris de croiser Monsieur Hulot en vacances dans le coin.

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J’ai invité Marion Pinaffo à concevoir un vernissage et son buffet, elle a ouvert une porte qui donne sur la plage, en guise de mise en bouche. Une fois les pieds dans
l’eau, on se laisse aller à rebondir de jeux de mots en formes sensées, d’humour en gastronomie, de goût en ergonomie… On retrouvera l’univers de cette jeune designeuse quelques heures plus tard dans une chapelle rénovée par les artisans bénévoles de l’association Sainte-Cécile de Plane-Sylve qui reçoit Marion. Le grand bassin est ici maquetté, on retrouve les objets de l’installation festive dans une ambiance plus sacrée ; cette deuxième étape nous éclaire sur le sens détourné des mots et des formes utilisés sur la place du village ; il est bien question, entre autre chose, de religion et de canards, ceux-là mêmes dont la chair entrait dans les recettes de tous les petits fours dégustés tout à l’heure.

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Sur l’autel, un téléviseur diffuse une vidéo qui montre sans emphase les recherches et expérimentations préparatoires de ‘Péchés aux canards’ ; c’est filmé dans une ambiance familière et tendrement drôle.
Ce vernissage a été inspecté par Auguste Legrand en personne, écrivain, éditeur et critique gastronomique français qui nous a attribué la note maximale (six cacahuètes) dans le guide Legrand des buffets de vernissage. (…) Patrick Tarres

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Commissaires :

Patrick Tarres : Directeur Artistique de l’AFIAC,
Manuel Pomar : Directeur du Lieu Commun à Toulouse,
Yvan Poulain : Directeur du musée Calbet à Grisolles en partenariat avec les Abattoirs, FRAC Midi-Pyrénées.

Les artistes : David Mickael Clark, IKHÉA©SERVICE N°58, Marie Aerts, Jeremy Laffon, Marion Pinaffo, Marie-Johanna Cornut et Marie Sirgue, Robert Milin, Rodolphe Huguet, Régis Perray, LASSIE / ARLT

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